Le Destructeur des Mondes : un scénario qui casse des briques [chronique – Alien]

Nous vous avons déjà dit ici à quel point nous avions apprécié la boîte de découverte d’Alien. Au-delà des qualités du jeu, au-delà de la qualité du matos proposé, ce qui nous avait marqué était en particulier le fait que cette boîte puisse se suffire à elle-même, chose plus que rare dans un océan de boîtes jetables qui nécessitent très vite de passer aux gros bouquins de 400 pages et plus.

En effet, le jeu Alien propose deux modes : l’un classique et l’autre dit « Cinéma » qui repose sur des one shot horrifiques et très mortels dans l’esprit de la prestigieuse série de films. Dans ce second cas, nul besoin de l’épais livre de base pour continuer à jouer : les règles simplifiées de la boîte suffisent.

Oui, mais.

La limite a cette bonne idée est que, pour jouer en monde « Cinéma », il faut des scénarios dédiés. Ces scénarios sont quasi inconcevables par soi-même. Non seulement ils nécessitent du matériel spécifique avec plans, marqueurs, cartes à jouer, etc. Mais, pour les créer, le MJ aurait de toute façon besoin du livre de base. Vous voyez l’impasse ? Or, la boîte de découverte n’en contenait qu’un seul.

Bien conscient du paradoxe, Arkhane Asylum s’est donc dépêché de vous traduire la deuxième boîte du mode « Cinéma », gentiment intitulée, donc : Le Destructeur des Mondes. Tout un programme.

Attention, si ce produit est bel et bien présenté en boîte (plus fine que la boîte de découverte), elle n’est pas du tout indépendante : les règles se trouvent dans la boîte précédente (ou dans le livre de base complet, bien sûr). Elle n’en est pas moins pas mal remplie.

Les conventions du mode « Cinéma » imposent en effet un certain matériel récurrent.

Ainsi, les personnages sont, comme dans un casting bien fait, prévus à l’avance et non pas créés par les joueurs. Cela nécessite des fiches détaillées de pré-tirés. Le but est néanmoins surtout de doter ces PJ d’objectifs personnels à atteindre durant le scénario : c’est nécessaire pour pousser les personnages à faire autre chose que fuir en hurlant ou rester caché pendant des heures dans un conduit d’aération.

Sans que cela soit absolument nécessaire, il est plus confortable que ces objectifs personnels soient distribués sous forme de cartes à jouer faciles à dissimuler et à consulter discrètement pendant la partie.

Du coup, tant qu’à fournir des cartes à jouer, le mode « Cinéma » propose aussi de tels accessoires pour représenter les PNJ et même le matériel. Là, on est clairement dans le gadget mais c’est justement ce genre d' »effets spéciaux » qui donne autour de la table l’impression de participer à une production à gros budget. Sans compter le confort d’usage que cela offre au MJ.

Vous voyez aussi apparaître sur la photo ci-dessus des cartes récit, « nouveauté » introduite par ce scénario. J’ai mis nouveauté entre guillemets car, fondamentalement, il s’agit de cartes « objectifs » sauf qu’ici elles ne sont pas dédiées à un PJ en particulier mais distribuées en cours de partie à celui qui déclenche tel ou tel aspect de l’histoire. On va y revenir mais, en effet, l’intrigue est présentée de façon assez peu linéaire.

Enfin, rayon matériel, ne pas oublier les cartes des lieux où se déroule le scénario. C’est un indispensable du gameplay d’Alien : les joueurs prennent conscience de l’immensité et du vide des endroits dans lesquels ils se retrouvent confinés, en général avec des invités peu recommandables. En effet, le mode « Cinéma » est clairement fait pour jouer avec les poncifs des films : il y a forcément un alien agressif quelque part (voire plusieurs mais non, quoi, j’ai pas spoilé !?). Si vous préférez varier les plaisirs, c’est possible mais il vous faudra alors le livre de base et son mode « Campagne ».

Les cartes sont à montrer aux joueurs, donc, et permettent grâce à des jetons d’indiquer les endroits où des intrus ont été repérés brièvement par les senseurs du système de sécurité. Elles permettent aussi de suivre l’évolution de la situation quand les PJ se séparent et ne restent reliés que par la voix.

La boîte se contente d’un seul livret, assez épais et toujours avec cette présentation classieuse (mais salissante…).

Alors, attention, ne vous y trompez pas :  qui dit « mode Cinéma » ne dit pas forcément maîtrise dans un fauteuil comme au cinoche. Clairement, cette boîte Alien n’est pas comme, par exemple, la boîte Elfes pour Terres d’Arran, avec des scénarios très scriptés qu’il n’y a plus à dérouler sous les yeux esbaudis de vos joueurs. Là, la présentation est très destructurée avec une présentation des PNJ puis, surtout, une longue description des lieux et, enfin, une série d’événements, certains obligatoires, d’autres facultatifs. Cela permet d’envisager d’adapter le scénario à votre main et à celle de vos joueurs : il peut devenir une vraie petite campagne en trois actes si vous voulez explorer tous les lieux et déclencher tus les événements. En revanche, ce n’est pas si facile à maîtriser par un MJ débutant. Bref, ce n’est clairement pas une boîte d’initiation.

Le livret se termine par un ombre de pages assez conséquent de précisions de règles et de contexte. C’est là la limite du système dual voulu par l’éditeur : on se rend compte que ce serait quand même plus pratique d’avoir le livre de base complet, en fait… Mais, bon, l’éditeur a l’honnêteté de ne pas contourner l’obstacle et de reproduire les pages nécessaires ici.

Au final, si vous n’avez pas peur de donner dans du Alien très classique et que vous êtes un MJ ambitieux qui est prêt à s’approprier le très riche matériel de cette boîte pour faire votre petit cinéma d’horreur SF à la maison, cette boîte est faite pour vous !

Une pensée sur “Le Destructeur des Mondes : un scénario qui casse des briques [chronique – Alien]

  • 13 mai 2021 à 11:50
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    Personnellement, je suis assez conquis par cette boite et ce scénario.

    J’ai un regret tout de même: sur certaines feuilles de personnages joueurs et sur certaines cartes de PNJ, il y a des informations qui devraient restées cachées aux joueurs:
    – Au moment de laisser vos joueurs choisir les pré-tirés, il ne faut pas donner les fiches en leur demandant de choisir. Il faut décrire les personnages et leur donner la fiche une fois qu’ils ont fait leur choix.
    En effet, sur certaines fiches, il y a des informations qu’il vaut mieux cacher aux autres joueurs pour éviter de gâcher certains rebondissements…

    – Dans le briefing de la mission, le livre demande de donner les cartes de certains PNJ aux joueurs.
    Le recto, ça va, mais au verso des cartes, il y a des informations très importantes sur certains PNJ. Notamment, une information qui risque de gâcher un peu le début de l’aventure si les joueurs y ont accès.

    Bref, Maman doit être très attentive au matériel qu’elle donne aux joueurs. Il faut vérifier qu’il n’y a pas trop d’informations…. C’est dommage que les concepteurs du matériel n’ait pas pensé à cet aspect de préservation des surprises que les auteurs du scénario ont mis en place.

    A part ça, c’est vraiment un très bon scénario qui proposera beaucoup d’actions et d’émotions aux joueurs….

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