Ah, les vils chafouins !

Comme vous le savez certainement si vous faîtes partie de nos fidèles lecteurs, quelques membres de la Redac6on (comment ça : surtout moi ??) suivent de près l’affaire de la réédition de Rêve de Dragon menée par le Scriptarium.

Et, de fait, ça y est, la souscription est active depuis une poignée de jours et atteint déjà… mazette ! … près de 300 % de l’objectif initial ! Décidément, on y reviendra dans les prochains jours (Into the odd, Chill 3…) la bulle (de rêve) des foulancements de JdR n’est pas encore arrivée à saturation et ce business se porte comme un charme (de tentation).

Pour ceux qui ont regardé ça de loin jusqu’à présent, rappelons qu’il s’agit d’un projet assez surprenant : rééditer quasiment à l’identique le livre de base de RDD 2ème édition (époque Multisim, donc) en changeant un peu la forme (mise en page plus aérée, illustrations couleurs…) mais pas du tout le fond (l’auteur, Denis Gerfaud, s’y oppose). Pour ne pas avoir l’impression de se transformer en photocopieuse, les gens du Sciptarium enrobent le tout de nombreux gadgets (nouvel écran, tarot, etc.) et surtout de la publication d’un livre-compilation réunissant une trentaine de scénarios de Denis Gerfaud parus jadis dans la presse rôliste. LA vraie bonne idée de cette réimpression, à coup sûr.

Alors, nous y voilà ! Ceux qui, comme moi, sont insensibles à la démarche nostalgique, ont déjà le matos (ou se contentent de la tonne de matériel PDF légalement et gratuitement en ligne) et peinent à voir où se trouve l’intérêt de la démarche d’une réédition à l’identique du jeu sont à l’heure du choix.

D’un côté, il faut souligner que l’offre du Scriptarium est simple et lisible : pas besoin d’être expert en foulancements pour comprendre que chaque livre ou gadget est disponible à l’unité. C’est comme à la cantine, on prend ce qu’on aime et on repose le reste poliment. Par exemple, pour moi, seul le livre d’aventures trouve grâce à mes yeux avec son méticuleux travail de collecte, son laborieux effort de remise aux normes de la v2 (règles mais aussi background puisque certains scénarios de la v1 reposaient sur des éléments de background rejetés par Gerfaud dans la v2 -+ les parchemins de sort par exemple) et ses choix forts (mais discutables, certes) d’un point de vue graphique (illustrations colorisées, plans refaits, etc.)… Bref, le choix est clair. Je pledge pour avoir ce livre et basta.

Mais.

Mais le marché du JdR 2.0 est ainsi fait que la tentation de prendre aussi l’inutile exerce une attraction contre laquelle il n’est pas simple de lutter. Comme dans la plupart des foulancements bien troussés, il existe des paliers « de riches » qui sont une sorte d’allégorie du capitalisme : plus tu peux miser d’argent au départ, plus ça te rapporte. En effet, des goodies sympathiques mais dispensables (nouvel écran quasiment identique au précédent, coffret de rangement, dés draconiques avec, par exemple, le D7 dont la face 8 est remplacée par un symbole de dragon – tip top -, tarot, livre dont vous êtes le héros, etc.) viennent s’ajouter « gratuitement » aux offres « de riches » si les pauvres pledgeurs que nous sommes continuent à mettre au pot. Ceux-là, bien sûr, n’en profiteront pas, eux…

Au final, les pledgeurs de niveau supérieur peuvent se retrouver pour un prix finalement raisonnable avec une tonne de matos… qu’ils n’auront pas choisi et dont on peut deviner qu’il ira rejoindre quelque étagère poussiéreuse où l’attendent d’autres jeux lancés par douzaine ou campagnes inédites bonus dont on n’avait, finalement, que faire.

Alors, allez-vous rester sagement du côté des tenants de la sobriété heureuse (ce qu’il me faut mais rien de plus) ou bien allez-vous être poussés vers la spirale inflationniste du crowdfunding et commander tout plein de trucs et de machins dont vous n’avez jamais eu besoin juste pour faire « une bonne affaire » (sic) ?

https://fr.ulule.com/reve-de-dragon-la-reedition-du-jeu-de-role/