Sycko of it all

Jérémie, l’homme à la tête de Sycko (bah quoi ? relisez la phrase avant de parler…), nous dit tout sur ses nombreux projets. Et le moins que l’on puisse dire, c’est que, même s’il prend son temps pour les peaufiner, il a pas l’air d’être dégoûté de tout ça. Non, vraiment pas.

1. Alors, ça y est : Crimes 2 est paru. Ouf, j’ai cru qu’il allait falloir faire un troisième foulancement. Ça a été un peu dur, non ?

Bah disons qu’on continue d’apprendre, un peu à la dure parfois, mais ça fait partie du jeu quand tu veux faire bouger un peu les mentalités. On s’était fait allumé sur la première version du foulancement sur le fait qu’on proposait des paliers payants ou que les ouvrages étaient trop chers. Honnêtement, quand je vois les CF ou les prix actuels, ça me fait doucement rire. Cela dit, je suis pas du genre à choisir la facilité et je préfère bousculer un peu les tendances. Et clairement sur Crimes, même si ça aura été pas mal galère jusqu’à la livraison, je suis plutôt fier du résultat.

2. Après ça, il paraît que tu veux donner encore des trucs à lire aux rôlistes, c’est vrai ça ?

Bah c’est bien connu que les rôlistes n’achètent pas pour jouer donc je garde la partie lecture… Blague à part, oui, parce que même si on a des livres de conseils pour jouer, mener, etc. il n’y a jusque-là que peu, pour ne pas dire pas, d’ouvrages dits de référence, qui parlent du JdR en tant que média. D’ailleurs c’est selon moi un peu symptomatique de mentalités selon lesquelles il ne fallait surtout pas traiter du JdR sérieusement. Il y a un changement qui s’opère depuis quelques années (le travail de Coralie David, les colloques JdR, les thémas Di6dent, la démocratisation via Mahyar Shakeri), et je tâche d’apporter ma pierre à l’édifice.

Par ailleurs, je n’ai envie de donner de la lecture qu’aux seuls rôlistes, pour moi ce sont des ouvrages qui peuvent pour tout ou partie s’adresser à des chercheurs, des curieux, ou n’importe qui s’intéressant à l’histoire du jeu en général, et du jeu de rôle en particulier.

3. D&D and philosophy… ah ouais quand même. C’est la suite de Dungeoncrawling & poetry, c’est ça ?

Si tu en as un exemplaire à me prêter, je suis preneur, depuis le temps que je le cherche ! Pour D&D and philosophy, on est moins dans le traitement historique que vraiment dans l’appropriation d’un élément de Pop culture (Dungeons & Dragons) comme prisme pour traiter de sujets philosophiques et de questionnement actuels d’une part, mais aussi pour explorer ces questionnements dans l’univers traité. Donc ce n’est pas une simple couche de vernis sauce rôliste pour faire de la philo de comptoir, on est dans une démarche bien plus intéressante et complète, accessible, entière, ou les deux objets thématiques (D&D d’un côté et la philosophie de l’autre) se répondent l’un l’autre.

4. Eh ben, t’as pas peur toi. Pourtant, la dernière fois, on peut parler de demi-succès pour le foulancement de Designers & Dragons, non ?

Comme je te le disais plus tôt, je suis pas du genre à choisir la facilité, et pour le coup sur Designers & Dragons, j’ai dû faire face à des déconvenues d’ordre personnel qui ont eu un très gros impact sur le temps et la manière dont je voulais mener la campagne de foulancement. J’avais pas mal de choses de prévues que je n’ai pas pu mettre en place, et cela s’en ressent naturellement sur le résultat. Et il y a bien sûr le fait que je proposais un produit d’un nouveau genre pour le public rôliste francophone. Tout ça plus le fait que c’était le premier vrai projet SYCKO en foulancement (donc où l’on peut difficilement jouer sur un historique de parutions ou de qualité), ça te fait un sacré combo qui fait que même un « demi-succès » comme tu dis, ben c’est déjà pas mal. Et ça ne m’empêche pas de croire à fond dans ma démarche éditoriale où à l’intérêt que ces ouvrages pourront susciter une fois qu’ils seront enfin sortis.

5. Tu prépares aussi la VF du jeu Infected. Apparemment, oh surprise !, il s’agit d’un jeu sur les zombies. Laisse-moi deviner : c’est l’originalité du thème qui t’a convaincu ?

Tout à fait ! Non, en réalité deux choses principalement m’y ont fait m’y intéresser. Tout d’abord, on n’est pas dans un contexte d’apocalypse ou d’invasion de zombies proprement dites. Ici les Infectés comme on les appelle ne sont pas des morts qui reviennent mais bien des vivants qui sont peu à peu consumés par une maladie. Si on peut retrouver des dilemmes moraux dans d’autres univers consistant à achever un proche par exemple, le fait qu’ici il ne soit pas mort donne une toute autre dimension à la menace et aux actions des personnages. On se rapproche plus par rapport à ça de films comme The Crazies, ou même Je suis une légende (abstraction faite de l’insulte au roman de Matheson que constitue ce… truc). Le contexte prend place 5 ans après la pandémie, et il ne reste plus qu’assez peu d’infectés. Et de fait on se concentre plus sur la survie et la reconstruction de la société que sur les zombies eux-mêmes. Donc sur les conséquences plus que sur la cause.

Le deuxième point, c’est le système et l’approche éditoriale, à savoir que le système est très accessible, la rédaction est didactique, et il y a un soin particulier pris pour s’adresser à des novices. Donc par rapport à mon intention de démocratisation, Infected se situe sur un thème qui peut intéresser un public relativement large, tout en prenant en compte que ce public n’est pas nécessairement un habitué du JdR (même s’il conviendra parfaitement à des vétérans également).

6. Ah, OK, OK… et, laisse-moi deviner : ce sera un foulancement, pas vrai ?

Mince, mais comment fais-tu ? Est-ce le fait que cet outil, au-delà de l’aspect financier soit ultra puissant d’un point de vue communicationnel, qui t’a donné la puce à l’oreille ? Ou bien le fait que pour une structure comme la mienne, et pour proposer la qualité d’ouvrage que je souhaite (mais même si je voulais faire moins), ce n’est rien moins qu’une nécessité ? Suis-je devenu si prévisible ? Ou bien est-ce le milieu ? Qui suis-je ? Dans quelle étagère ?

7. Toujours fidèle à Ulule pour tes foulancements ? Tu seras bientôt le dernier des Mohicans, non ?

Jusque-là oui, même si ces derniers temps on a pu voir un petit retour de quelques éditeurs vers Ulule, c’est une plateforme qui ne se limite pas qu’à ce que l’on peut voir sur l’écran ou la page du projet. Il y a d’une part le fait que je crois profondément que pour conquérir de nouveaux publics et s’adresser à des joueurs qui s’ignorent, ou de simples curieux, c’est plus facile sur une plateforme que l’on qualifiera de généraliste. D’autre part, il y aussi un aspect communautaire qui est développé autour des porteurs de projets, pour faciliter des rencontres et des synergies entre différents milieux, ce qui rejoint un peu le point précédent. Enfin en tant que porteur de projet, et même si je m’informe et me forme régulièrement, c’est toujours appréciable d’avoir un accompagnateur dont c’est le métier qui pourra répondre à mes éventuelles questions et sera au point au niveau juridique et légal. Donc à l’heure actuelle, pour le même prix que les autres, Ulule répondant à mes besoins et à ma démarche personnelle en tant qu’éditeur, je ne ressens pas la nécessité d’aller voir ailleurs.

8. Depuis Libreté, aucun autre jeu n’a été lancé sous le label de l’Homme-Orchestre. Fausses notes ou bien ?

Non, au contraire, j’ai eu beaucoup de demandes et de contacts, certaines sortant pas mal du cadre du label avec des projets intéressants, mais aussi un peu plus ambitieux que ce pour quoi le label est calibré. Du coup il y a une sélection naturelle qui se fait, mais il y a aussi l’étude du projet qui peut prendre du temps, les discussions avec les auteurs etc. pour voir que la démarche et la distribution des rôles ont été bien comprises. Comme j’encadre aussi pas mal les choses, de façon à ce que le projet puisse sortir dans les 6 mois après la fin du CF, il y a parfois la nécessité de repousser, de ne pas faire d’annonces trop tôt, le temps de peaufiner tout ça et de s’assurer que les choses vont se dérouler correctement. Cela étant dit, le projet des Cycles d’Aïag, par Guillaume Herlin, a été annoncé et va bientôt arriver sur Ulule.

9. Pour finir, un truc peu commun : tu viens d’ouvrir un Tipeee pour Sycko. Tu veux qu’on te paye deux fois, en tipant et en achetant tes bouquins ? Ouah, t’es un roublard, toi !

Nan, vraiment, t’es trop fort, c’est ma classe de perso quand je joue à D&D ! Cela dit, j’ai monté SYCKO et le travail en amont des premiers projets sur mes économies, et pour le moment je n’ai pas assez de références au catalogue pour m’assurer de pouvoir continuer sur le même rythme pendant longtemps. Donc pour le moment, les projets et les ventes servent à financer les projets et payer les différents contributeurs, mais pas encore à me payer moi-même correctement. Je me suis dit que Tipeee pourrait être une solution à envisager à ce niveau, pour soutenir ma démarche, mais aussi explorer d’autres façons de mettre du matériel à disposition et d’échanger avec la communauté. Indirectement c’est aussi une façon pour moi de me remotiver à bosser sur des projets plus personnels, avec en tête de liste Forains

http://www.sycko-fab.com/

https://www.facebook.com/sycko.editeur

https://www.tipeee.com/sycko

2 pensées sur “Sycko of it all

  • 16 juin 2017 à 09:22
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    Le titre, c’est de belle référence pointu !

  • 16 juin 2017 à 10:37
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    Article très intéressant !

Commentaires fermés.