Dis, Arnaud, c’est encore loin Avalon ?

Aujourd’hui, le Fix t’entraîne dans le turfu (…) Non, je veux dire, pas en parlant d’un foulancement qui aurait trois ans de retard, d’un décalage de planning de 18 mois ou ce genre de choses habituelles. Là, on va te parler du vrai turfu en interviewant l’auteur d’un jeu, Avalon, qui n’a même pas encore trouvé d’éditeur. Alors, comment on peut être sûr que le jeu en question sorte un jour, hein ? La réponse tient en deux mots. Arnaud. Cuidet.

 

1. Bonjour, Arnaud. La rumeur publique me rapporte que tu serais l’auteur d’un jeu qui s’appelle Avalon. (…) Alors, vu ma collection hyper-complète de JdR, ça m’étonnerait : je l’ai pas ce jeu. Alors, quoi ?

La rumeur est presque vraie. Avalon n’est pas encore sorti. Pour des tas de raisons, et notamment celle que j’ai des ambitions pharaoniques pour ce jeu, sa conception et la phase de test a duré (beaucoup) plus longtemps que prévu. Il n’a fallu « que » 5 ans à Metal Adventures pour sortir, et ça fait déjà 7 ans que je travaille sur Avalon… et je ne l’ai encore montré à aucun éditeur ! Cependant, et je soupçonne que ça a un lien avec l’interview d’aujourd’hui, j’ai décidé que, coûte que coûte, je le montrerais à des éditeurs à la rentrée 2018. Du coup, si tout se passe bien, il pourrait sortir en 2019 ou en 2020.

2. Donc, tu cherches un éditeur. Ça veut dire que le Matagot (Metal Adventures) et les XII Singes (Faust Commando) t’ont blacklisté ou c’est toi qui ne veux plus bosser pour eux ?

C’est quoi cette question à la con ? Ni l’un ni l’autre, bien sûr. Matagot et les XII Singes seront les premiers éditeurs à qui je montrerais Avalon, mais malgré les (très) bonnes relations que j’entretiens avec eux, je ne peux pas préjuger de leur décision. Tant que je n’aurais pas un contrat signé sur la table, je me considérerais comme « à la recherche d’un éditeur ».

3. Bon, nous disons donc : un livre des joueurs de plus de 500 pages, un livre du MJ de 250 pages, une campagne sous forme de boîte, des tuiles tactiques (avec les pions et compteurs qui vont bien)… Hum, c’est vrai que ça peut en refroidir plus d’un, non ?

Je ne peux pas te dire, moi c’est l’inverse, ça m’excite. 

Mais je crois deviner la question qui se cache derrière la question. Il y aurait cette idée que les rôlistes préfèrent les systèmes légers, toussa toussa. Alors, déjà, les ventes de D&D et de Pathfinder disent le contraire et ensuite (surtout), ça n’a aucune importance à mes yeux : je fais les jeux auxquels j’ai envie de jouer. Et moi, les jeux qui m’excitent, c’est ceux avec des tables d’armes trop grosses pour tenir sur une double page, les jeux où on fait la différence entre les différents types de munition, et surtout les jeux où on peut sortir la vraie artillerie lourde… c’est-à-dire de l’artillerie lourde ! Je suis fan de Shadowrun, de Cyberpunk 2020, mais aussi de Metal Gear Solid, et de XCOM. C’est vrai que comme tous ces jeux, Avalon sera un jeu Hardcore gamer.

4. En fait, si j’ai bien compris, le jeu est fini de chez fini, testé et re-testé. J’ajoute que tu as une solide crédibilité dans le milieu. (…) Hmmm, tu n’as jamais entendu parler du crowdfunding ou bien c’est comment ?

Non, je ne souhaite pas sortir Avalon tout seul en passant par un crowdfunding (C’était ça la question ?). Je suis peut-être vieux jeu (ou un peu couillon, au choix), mais je me dis que auteur et éditeur, ça n’est pas le même métier. Et puis, je trouve ça beaucoup plus confortable de travailler avec un éditeur que de tout faire moi-même… ce dont je serais en outre incapable, vu le matériel qu’Avalon nécessitera, notamment pour les dalles de jeu tactiques.

5. Revenons au jeu lui-même. Le sujet, c’est à la fois les espions furtifs et les agents spéciaux des forces d’élite. C’est compatible ça ?

En fait, il y a une astuce au niveau du background qui me permet de rassembler tout ce beau monde. Mais si je révèle celle-ci, il faut que je te tue et que je détruise toutes les copies de ce fichier. Du coup, je n’en parlerais pas.

Par ailleurs, et ça je peux le dire, la création de personnages permet à chaque PJ de pouvoir se débrouiller dans tous les aspects du jeu. Ensuite, chacun fera le choix de se spécialiser ou pas.

6. Tu aimes présenter Avalon comme un jeu « à missions ». C’est un truc qui débute toujours dans une auberge avec un elfe mystérieux encapuchonné, c’est bien ça ?

Presque ! En fait, vu la façon dont Avalon est structuré, ce sont les PJ qui vont chercher l’elfe encapuchonné dans l’auberge. C’est à eux de faire la démarche de découvrir et d’approcher les commanditaires potentiels. En principe, à la fin de chaque séance de jeu, les PJ ont le choix entre plusieurs missions pour la prochaine séance, et c’est eux qui la choisissent. Ce choix peut être lourd de conséquence, ne serait-ce que parce que si les PJ attendent trop longtemps pour s’attaquer à une mission, celle-ci peut se « périmer » et être perdue à jamais !

7. Tu n’es pas du genre à prendre les règles du jeu à la légère. Est-ce que cela veut dire que l’usage des tuiles tactiques et des pions est strictement obligatoire dans le jeu ?

Oui.

8. A part les tuiles, tu parles de « mécanismes de jeu originaux ». Genre ?

Au risque de passer pour le Jean-Claude Van Damme du JdR, je dirais que dans Avalon, ce qui est le plus original, ça n’est pas tel ou tel mécanisme, mais la philosophie générale du jeu. Avalon propose aux joueurs d’incarner des combattants d’élite, et suppose donc que les joueurs sont prêts à relever le défi : c’est à eux de prendre l’initiative de l’action et d’être moteur de la partie. Une sorte de « narration partagée simulationniste » ;). C’est l’une des raisons pour lesquelles le Manuel des Joueurs d’Avalon est aussi copieux : tous les petits outils de gestion technique qu’on trouve d’habitude dans les scénarios (pour découvrir tel indice, il faut un test de bidule, pour convaincre tel PNJ, il faut un test de truc) sont dans le MdJ, et c’est aux joueurs de choisir la tactique (et la règle !) qui leur convient pour remplir leur mission. De son côté, le MJ ne dispose que d’un scénario réduit à sa plus simple expression (les motivations des PNJ, les particularités du terrain, quelques imprévus, etc.) car c’est aux joueurs de construire le déroulement de la mission par leur choix stratégiques et tactiques.

Le corollaire de ça, et auquel je tiens beaucoup, c’est qu’Avalon propose des théâtres d’opérations, décrits à la façon d’un openworld. Les PJ disposent d’une carte opérationnelle et d’un guide de campagne qui leur permettent de se repérer dans le théâtre, d’aller où ils veulent, de s’installer comme ils veulent et éventuellement de partir à son exploration en dehors de toute mission. Ils peuvent se créer un réseau de contacts, installer des planques, découvrir des lieux et des missions secrètes, etc.

De toute façon, je reste fidèle à cet adage mis au point par Eric Paris pendant la conception de Nephilim 3ème édition : il n’y a pas de rupture entre les règles et le roleplay. Pour installer l’ambiance particulière d’Avalon, il faut mettre les joueurs dans une disposition particulière : les confronter à des situations tactiques coriaces, les priver de toute aide pouvant venir du MJ, mais mettre également à leur disposition tous les moyens pour les remplir. Et c’est l’une des autres raisons pour lesquelles le MdJ est aussi copieux : ce panel de solutions ira du PJ débrouillard qui se déguise en soldat ennemi jusqu’au PJ bourrin qui débarque en blindé léger en passant par le technicien qui piratera les communications radio pour faire pleuvoir un barrage d’artillerie (lourde).

Bon, après, en termes de « mécanismes de jeux originaux », je pourrais te parler de la Transcendance et de l’Hubris, mais là aussi, il faudrait que je te tue. 😉

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