C’est l’histoire d’un mec…

… il a inventé le JdR, le mec.

Nan, pas Dave Arneson. L’autre. Voilà : Gary Gygax.

C’est cette histoire que Sycko vous propose de découvrir en éditant la VF de L’empire de l’imaginaire, le livre de Michael Witwer.

Un foulancement se déroule en ce moment même sur Ulule : https://fr.ulule.com/biographie-gygax/

Attention d’ailleurs ! En cette période de reprise, le Fix a encore les tongs aux pieds et du sable dans les poches et on a du mal à écluser notre retard devant la folle marche de l’info JdR. Bref, on est un peu à la bourre et il ne reste donc qu’une semaine pour souscrire. Or, si le projet a déjà progressé à 60 % de son objectif, on n’y est pas encore. On se comprend : c’est pile le moment d’aller mettre un coup de collier, pas vrai ?

Franchement, je suis bien aise d’avoir eu l’occasion de lire en avant-première cet ouvrage avant d’en rédiger une news car l’objet du livre n’est pas si facile que cela à borner.

D’une part, le style. Il s’agit donc d’une biographie qui, par bien des côtés, offre toutes les garanties de sérieux d’un ouvrage universitaire : épaisse bibliographie, volumineuses notes de bas de page, etc. Mais, de l’autre, l’auteur, Michael Witwer, a fait le choix, étonnant vu de ce côté de l’Atlantique, de romancer de larges passages de la vie de Gary. Très régulièrement, on lit des dialogues privés supposés se dérouler entre Gary et sa famille ou avec ses potes de jeu, on découvre des moments de réflexion internes de Gygax… bref, autant de choses qui ne sont, bien sûr, que des « vues de l’artiste ». C’était sans doute un procédé indispensable pour « combler les trous » d’une vie qui reste tout de même bien moins documentée que, disons, celle de Napoléon 1er, par exemple. Il n’en reste pas moins qu’il est préférable de le savoir avant de se lancer dans l’acquisition du livre.

D’autre part, le sujet même du livre. C’est entendu : ça parle de la vie de Gary Gygax et, comme le laisse entendre le sous-titre, de la naissance de D&D. Or, après lecture, mon impression est que le sujet du livre est ailleurs. Bien sûr, l’enfance de Gary, ses premières années de wargamer passionné, tout cela est abordé et semble très complet sur la vie de notre roi des geeks. Pour autant, aussi honorable soit-elle, la vie de Gygax ne mérite peut-être pas un ouvrage de plus de 300 pages quand même. De même, les moments-clefs de la création de D&D sont bel et bien abordés mais, au final, l’impression ressort que l’on ne parle pas tant que cela de jeu, de règles  ou même d’écriture dans ce livre.

Non, ce qui occupe le plus de pages, c’est sûrement : l’économie du hobby. Bien que je ne sois assurément pas un spécialiste de cette période, si le bouquin m’a semblé tout particulièrement bien renseigné, c’est sur les détails de la vie éditoriale de D&D dans ses premières années. Contexte de lancement du produit, coûts divers, locaux utilisés, personnel… cette plongée dans le TSR de l’époque est assez vertigineuse et bien rendue.

Surtout, là où la forme romancée semble se justifier le mieux, c’est quand le récit aborde les tumultueux épisodes de luttes de pouvoir au sein de l’éditeur historique jusqu’au départ de Gary sous forme de brouilles entre vieux amis et de petites précisions. Si, pour tout dire, en tant que rôliste, je n’ai jamais éprouvé tellement le besoin d’être informé sur ces dessous de l’histoire, sa mise en récit est rudement bien faite et donne l’impression de se retrouver dans un épisode de Mad Men. Saut qu’au lieu des cheveux gominés et des costumes cintrés, les protagonistes portent la barbe et des chemises hawaïennes, bien sûr.

Ce qui doit nous réjouir dans cet étonnant projet, c’est l’existence même de cette nouvelle catégorie de livres sur le jeu et l’histoire du jeu qui prouvent que notre hobby a atteint un certain stade de maturité où il peut commencer à se retourner sur son parcours de plus de 40 ans et se questionner sur son histoire, ses limites et ses perspectives.

Si vous partagez ce constat, cela tombe bien : après Designers & Dragons, Sycko semble vouloir s’inscrire tout particulièrement dans cette veine et possède dans ses cartons d’autres projets comme par exemple la traduction de D&D and Philosophy. Tout un programme.