Damien C. tout sur les zombies

Damien C. fut pendant longtemps le visage médiatique de Black Book Editions. Mais comme toutes les vraies rock stars, il a décidé de se lancer dans une carrière solo. Voire même une double carrière solo puisqu’il anime une chaine youtube tout en développant en parallèle son propre JdR. Qui, apparemment, va contenir des zombies. Il nous en fallait pas plus pour aller à sa rencontre lui poser quelques questions pour en savoir plus.

Le Fix : Salut Damien, nous c’est le Fix. On aime poser des questions qui piquent. Et toi, t’es qui ?

Damien : Moi, je suis Damien Coltice. J’aime… le jeu de rôle, le basket-ball et la musique ! J’ai vécu une folle odyssée de 18 ans qui s’est terminé il y a un peu plus d’un an avec Black Book Éditions. Et je me suis lancé dans une nouvelle aventure, celle de la Rôliskatonic et de l’écriture d’un jeu de rôle de zombies motorisé avec un d100 !

Le Fix : Tu sais que le Fix recrute !? Et pourtant, tu lances ta propre chaîne youtube en solo. Tu regrettes de ne pas nous avoir rejoint ou tu t’épanouis sur ta chaîne ?

Damien : Ah ah, le Fix, c’est trop de taf, je ne pourrais jamais. Je ne sais même pas comment vous parvenez à être si régulier alors que ce n’est pas votre travail. Bravo ! D’ailleurs, à titre perso, je pense qu’on est arrivé dans le milieu du JdR quasi en même temps. C’est chouette de voir qu’on est tous encore là, et que la passion du JdR ne nous a jamais lâchée !

Quand je suis parti, je voulais continuer à faire de la vidéo… mais on peut toujours réfléchir à faire des choses ensemble, on n’a simplement pas pris le temps d’en parler ! Parlons-en !

Je m’épanouis dans ce que je fais depuis le lancement de la Rôliskatonic. Le but était d’essayer de faire un petit truc tout seul dans mon coin pendant un ou deux ans, sans d’autres obligations et envies que les miennes, pour me ressourcer. J’avais — et je ressens toujours — un gros besoin de revenir à ce que j’aime le plus faire dans le jeu de rôle.

Parce qu’avant de dessiner les contours du projet Rôliskatonic, il a d’abord fallu que j’arrive à répondre à cette question : qu’est-ce que j’aime le plus dans ce milieu ?

Je pense que pour tous mes proches, la réponse était évidente, mais pour moi, c’était plus compliqué. J’ai appris à tout aimer de mon travail dans le jeu de rôle. J’ai aimé faire les colis, j’ai aimé réfléchir au site Internet, à la compta (et pourtant, je partais de loin à ce niveau-là^^),  j’ai aimé traduire (en réalité, c’est ce que j’ai trouvé le plus difficile), relire, faire des maquettes, produire, animer un forum, préparer un crowdfunding, etc.

Bref, j’avais envie de dire oui à tout. J’avais du mal à répondre à la question. Après quelques mois, j’ai fini par mettre le doigt sur ce que j’aimais le plus : partager ma passion pour les jeux, pour la création en JdR et les gens qui créent. Et écrire un jeu de rôle !

La Rôliskatonic a été le moyen de marier les deux projets en un et de rendre le truc un minimum viable sur un ou deux ans via une page de soutien Tipeee. C’est une chaîne youtube où je décortique tous les mardis à 12h30 un JdR par mois, où  je parle tous les jeudis à 12h30 de création via des interviews de créatrices et créateurs, via du partage de connaissance sur la création et la publication d’un JdR et via l’application de mes vidéos à l’écriture de mon jeu de rôle de zombies.

Interview, jeux du mois, game design. Une chaine toute jeune et pourtant déjà très riche en contenu.

Le Fix : Tu travailles depuis des années sur un jeu de zombies. Pour toi, un univers zombie, c’est plutôt Walking Dead (le comics) ou Zombieland (les films) ?

Damien : Disons que j’ai commencé à travailler sur un système d100 que je souhaitais moderniser en faisant jouer à des amis un scénario ambiance Cthulhu inspiré par un bouquin méconnu de Anne Rice. A cette époque, j’entrais comme beaucoup dans The Walking Dead et je trouvais qu’il manquait d’un bon jeu de rôle de zombies. C’était juste avant l’annonce de Z-Corps chez 7e Cercle. Cette annonce, couplée à la quantité de travail que j’avais à l’époque, ont eu raison de cette envie.

Cependant, à plusieurs moments de ces 10 dernières années, j’ai continué d’y réfléchir. Mon système d100 et mes zombies se sont mixés assez naturellement et j’ai eu quelques courtes mais productives périodes d’écriture sur le jeu. J’ai également accumulé beaucoup de notes, écrit pas mal de règles, et pensé à différentes façons d’envisager la publication d’une gamme de ce type.

Après mon départ de BBE, j’avais clairement deux projets en tête, un de medfan, sur lequel j’avais commencé à écrire sous le nom de code de Crépuscule, et mon jeu de zombies d100. Avec la fin de la gamme Z-Corps, je trouvais que le champs était libre… je voulais faire un jeu qui marche sur le moins de plates-bandes possibles.

Pour moi, un univers de zombies, c’est d’abord plus le côté genre, où l’on peut s’amuser et passer d’un univers à l’autre. Si j’ai la chance de développer une petite gamme sur ce jeu, j’aimerais explorer différents genres zombies. J’aime bien l’idée que mon jeu puisse être une boîte à outils zombies. Quelles que soient les préférences des uns et des autres. Mais soyons honnêtes, j’ai un penchant pour le côté réaliste et le survival horror. J’aime beaucoup les histoires horribles comme l’humanité sait malheureusement en inventer régulièrement. Comme je le dis souvent en ce moment, j’adore en jeu de rôle… tout ce que je déteste dans la vraie vie ! Bref, je suis plus Walking Dead que Zombieland, mais j’aime beaucoup Zombieland et l’humour aussi. Et j’aime aussi les zombies plus mutants et gore et ceux qui remontent aux origines : les zombies du vaudou !

Le Fix : Par contre, faut qu’on cause. Il paraît que le système choisi est le Basic system. Pourquoi ce choix ?!

Damien : Alors non, ce n’est évidemment pas le Basic system. La base, c’est un d100 et il faut faire moins que le pourcentage testé (il y a déjà une subtilité en écrivant ceci par rapport au Basic qui le différencie), mais après, je voulais plein de choses différentes que ce système avec lequel je ne suis plus en phase depuis de nombreuses années.

Je voulais essayer de mettre ensemble deux aspects a priori contradictoires, mais qui ne le sont pas pour moi : à savoir un côté freeform et narratif qui serait allié à une mécanique permettant de proposer des éléments de règles suffisamment précis pour faire du survival horror. Car on ne peut guère flipper pour son personnage si seul le MJ décide du sort des persos et que les dés et les prises de décisions des joueuses et des joueurs ne comptent pas.

Mon d100 fonctionne par lecture directe, qui est une mécanique tellement simple et élégante ! Il faut donc faire moins que le pourcentage testé, mais essayer de faire le score le plus élevé possible. Associé à la mécanique des qualités, où le chiffre des dizaines constitue la qualité d’une réussite du test, ce d100 reste simple mais propose cette précision ludique permettant de construire plein de choses sympas autour.

Au final, je suis content de ce système. Sans être révolutionnaire, j’ai l’impression qu’il m’a permis de construire un d100 qui est très narratif puisque la simple lecture du dé permet sans calcul de donner plein d’infos sur lesquelles improviser la manière dont un test réussit ou échoue. Et grâce aux qualités de réussite ou d’échec, un d100 qui, pour ceux qui le souhaite (mais ce n’est pas obligation), offre des opportunités ludiques intéressantes et fun, et assez facile à improviser également. Je suis vraiment très content de son équilibre freeform/précision.

Et pour finir sur le sujet « non, ce n’est pas du Basic », voici quelques exemples : il n’y a pas de points de vie, il n’y a pas de santé mentale, il n’y a pas de tables de résistance, et les personnages n’ont pas des dizaines et des dizaines de compétences.

Il y a des dés de stress (d’adrénaline ou de panique, fonctionnant comme des dés d’avantage ou désavantage à la D&D 5e), il y a une symétrie très très forte entre physique et mentale et d’ailleurs et j’ai écrit autant de pages pour le combat physique que pour les affrontements psychologiques et sociaux. Par hasard, je crois avoir d’ailleurs trouvé un nouvel outil de roleplay. Cela fait des années que j’en cherche qui fonctionne vraiment, qui provoquent facilement et naturellement du RP et sans le vouloir, je crois que je suis tombé dessus. A suivre, ce sera aux joueuses et aux joueurs de me dire…

Illustration de Stephanie Böhm

Le Fix : Quelles sont tes inspirations ? Que ce soit en terme de JdR ou d’autres médias, d’ailleurs.

Damien : J’ai lu trop de jeux de rôle pour citer toutes mes inspirations. En réalité, à force d’être dans le milieu et d’en lire beaucoup, je me suis aperçu que toutes mes super idées accumulées ces 10 dernières années ont fini par déjà être publiés chez d’autres. Ainsi, certaines mécaniques peuvent évoquer d’autres jeux que j’ai finalement récemment, par exemple Alien avec sa mécanique de stress, Unkown Armies, un bijou de règles d100 pour l’époque, mais dont je ne connaissais que le background jusqu’à très récemment. Je ne m’étais pas rendu compte de la perle d100 que c’était à sa sortie, parce que je n’avais pas lu la partie sur les règles ! On est bien peu de chose des fois…

Mais pour les inspirations claires et nettes, je dirais : Earthdawn dont le système de blessure, d’une simplicité enfantine, a posé la base de mon système de santé, Dragonlance Fifth Age, pour la réflexion sur la présentation des tests, des scénarios, L’Appel de Cthulhu, qui reste une référence sur le thème du survival horror malgré ses défauts, les scénarios de Yno, comme Notre Tombeau pour n’en citer qu’un, qui a cette envie de toujours surprendre et d’essayer de proposer des situations de mise en scène sortant de l’ordinaire, Le Grümph pour ses master class du monde de jeu bac à sable, Shadowrun et Earthdawn pour la manière de développer un univers et un meta-plot saisissant. Ah oui, et je ne peux absolument pas oublier de parler de Pathfinder, dont l’écriture des scénarios, 10 après la sortie du premier volume de la campagne l’Eveil des seigneurs des runes, reste en avance sur son temps. Pathfinder a été une révélation sur la manière de penser et écrire des scénarios du commerce. Je suis toujours étonné de voir le nombre de créateurs qui n’en ont pas pris conscience…

Le Fix : Tu te donnes combien de temps pour écrire ton jeu ?

Damien : Il me reste deux scénarios à écrire et quelques articles un peu fun pour finaliser le premier volume. Cela m’aurait donc pris un an de travail régulier. Le plus dur a été d’écrire les règles sur lesquelles toute la gamme sera bâtie. Il faut que ça tourne, il faut être précis, et avoir suffisamment d’idées et de points de règles pour construire des évolutions dessus. Ça a été un gros travail, j’ai récrit mes 80 pages de règles (création de personnage, équipement et bestiaire zombie compris) au moins 8 fois…  D’ailleurs, je remercie profondément les auteurs, autrices, et les playtesteuses et playtesteurs qui m’ont aidés et stimulés. Le jeu est bien meilleur grâce à tous ces retours exigeants et passionnants.

Pour la suite, je n’aurais plus à réécrire cette base du système de jeu, donc j’aimerais pouvoir sortir un ouvrage supplémentaire tous les 6 mois. Je pense que c’est du domaine du possible.

Le Fix : D’ailleurs, il a un nom ton jeu ?

Damien : Le titre provisoire est « Zombies d100 System », mais le nom final du jeu sera communiqué une fois le dépôt à l’INPI validé. J’espère pouvoir le communiquer d’ici fin octobre…

Le Fix : Perso, j’adore les zombies. Et le fait que tu vas proposer un mode bac à sable ET une campagne avec un fil rouge me plaît beaucoup ! Que peux-tu nous dire sur ce fil rouge ?

Damien : Oui, une des envies sur les ouvrages de la gamme zombies, c’est de proposer 3 scénarios à chaque ouvrage.

Un scénario one-shot ambiance « essayez de survivre », un peu comme le fait Johan Scipion avec Sombre, que j’aime beaucoup, pour vivre des sensations fortes et explorer les différentes thématiques du zombie.

Et deux épisodes de deux campagnes différentes :

La première campagne sera un grand bac à sable. On commencera petit : les PJ devront survivre et aider leur communauté à survivre dans une petite zone géographique, et cette dernière s’agrandira au fur et à mesure, à force d’exploration. L’idée est de proposer des descriptions, des PNJ, des évènements et de laisser les PJ décider eux-mêmes de ce qu’ils font, de la gestion de leur communauté, etc. Les règles de gestion seront simples, mais suffisantes pour mettre la pression quand nécessaire (plus assez de nourriture ? de médicaments ?) ou offrir des bienfaits et des bons moments à d’autres (vous mangez assez ? vous êtes en forme !). Il y aura des zombies, des ennemis cools, des ennemis moins cools, des problématiques de ressources, des conflits, des PNJ attachants, etc.

La seconde campagne, dite storyline, développera un univers de jeu propre. L’idée, c’est qu’une épidémie commence en 2025 (j’espère ne pas nous porter la poisse !), et que les PJ vont être amenés à découvrir, à terme, sa mystérieuse origine. On sera donc dans quelque chose de plus enquête, héroïsme, grands secrets, grands méchants. Je n’en dis pas trop, mais disons que cet univers est un univers à secrets, et que si le jeu marche bien, j’ai pas mal d’idées et de surprises. Mon but secret est que le jeu marche suffisamment pour que je puisse les exploiter ! J’ai l’impression qu’en tant que client, cet univers et la découverte de ses secrets me plairait beaucoup. Généralement j’ai des goûts assez classiques et assez partagés par la communauté, donc je me dis que si ça me plairait comme rôliste, ça pourrait plaire à pas mal de gens. A suivre, c’est le pari de ce jeu !

Le Fix : Grâce à Shawn of the Dead, j’ai bien compris qu’en cas d’invasion zombies, il fallait tous se retrouver au Winchester. Et dans ton jeu, que pourront faire les PJ ? Est-ce qu’il y aura que des survivants à jouer ?

Damien : Dans le premier ouvrage, on jouera vraiment des outbreaks, des moments où le phénomène zombie surgit dans le monde réel. Du coup, les prétirés par exemple, ne seront pas des héros badass, mais des gens « normaux », qui doivent survivre avec ce qu’ils ont sous la main ou… qui doivent fuir ! Dans les ouvrages suivants, je développerais plus le côté survivant, le côté post-apo ensuite et enfin, des aspects plus héroïques, ou gore, etc. Mais chaque chose en son temps !

L’idée, c’est surtout que si vous aimez les zombies, vous puissiez vous amuser avec le jeu et le genre, en allant dans la direction qui vous plaît et avec un système de jeu qui vous permettra de jouer en mode très narratif ou en mode survival horror avec des règles qui tiennent suffisamment bien la route.

Le Fix : Est-ce que tu vas faire appel à d’autres auteurs pour participer au projet ?

Damien : Non. D’un côté, j’adorerais demander des scénarios aux gens que j’adore. Mais de l’autre, je vis ce moment d’un ou deux ans comme une période pour me ressourcer. Je ressens vraiment ce besoin de tout faire moi-même, d’aller au bout de ce projet en solo. Ce n’est encore que le début et je suis surmotivé, mais peut-être que je verrais les choses différemment dans quelques temps après des mois de travail, qui sait ? Ce jour-là, je n’hésiterais pas à demander.

Le Fix : Est-ce que tes zombies seront « modernes » et peuvent courir ?

Damien : Dans le premier volume, je vais développer plusieurs variations du zombie classique : celui qui cherche juste à répandre l’infection, sans intelligence particulière. On pourra mixer plusieurs blocs pour créer de nombreux zombies différents en termes de puissance : le bloc du corps de l’hôte, faible, moyen, fort. Le bloc d’instinct qui fait du zombie un marcheur, un prostré immobile qui vous surprendra, un zombie limité à un espace géographique, un traqueur capable de rester fixé sur une même proie ou un enragé qui se déplace plus vite et a droit à une action supplémentaire par tour de jeu… Pour résumer et répondre clairement à ta question, oui, l’enragé pourra courir, mais pas les autres. Et dans les ouvrages suivants, on ira voir de tous les côtés des zombies, pas juste les basiques.

Le Fix : En dehors de ton jeu, quelle est l’actu de ta chaîne ?

Damien : L’actu de la chaîne, passe évidemment par la page Tipeee des dons. En effet, jusqu’à présent, tout ceci n’est possible que grâce aux généreux soutiens qui donnent 3 à 9€ par mois pour faire en sorte que je puisse rester indépendant et que je puisse donner tout mon temps aux vidéos et à l’écriture de mon jeu. C’est une évidence, mais sans ces personnes, rien de tout cela ne serait possible.

Du côté des jeux du mois des émissions du mardi, après Vampire v5, que j’ai beaucoup aimé, j’attaque Iron Kingdom Requiem, un univers qui m’a toujours beaucoup attiré. Du côté des vidéos de création du jeudi, on a reçu Tristan Lhomme pour parler d’écriture de scénario et c’était vraiment super ! On arrive aussi aux étapes de maquettage et de relecture de la création d’un jeu de rôle. J’invite les lectrices et les lecteurs du Fix à venir y jeter un œil, notamment s’ils sont le goût de la création. Qui sait, ça les aidera peut-être ? C’est mon but en tous les cas. Faire en sorte que les créatrices et les créateurs qui arrivent après moi puissent acquérir plus vite les connaissances que j’ai mis presque 20 ans à découvrir, souvent en faisant beaucoup d’erreurs !

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3 pensées sur “Damien C. tout sur les zombies

  • 5 octobre 2023 à 14:22
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    Chouette ! je vais visionner quelques vidéos des personnes interrogées. On voit que que Damien Coltice a des contacts dans le milieu rôlistique ;°)

    Pour le « fil rouge » de campagne, ça serait comme celui de l’illustration de Stephanie Böhm présentée dans l’article ? :°)

  • Ping : C'est Lundi, c'est... gratuit ! - Le Fix

  • 20 novembre 2023 à 12:57
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    La question la plus intéressante : « Qui a besoin d’un jeu de zombies en 2023 ? » a malheureusement été oubliée.
    Ça pique moyen, du coup…

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