Inspirés par la spirale ? [chronique suppléments Darkrunes]

Après une souscription malheureusement non aboutie mais tout de même validée par le soutien de la communauté, les p’tits gars de chez Yggdrasil Editions continuent de faire vivre leur jeu, Darkrunes, à travers trois nouveaux suppléments. Mais au lieu d’une livraison aux souscripteurs et d’une sortie boutique, ces derniers sont uniquement disponibles en PDF ou en impression à la demande (en version spirale comme vous pouvez le voir sur les photos).

C’est dommage car, malgré un livre de base brouillon dans sa proposition ludique, le jeu se précise et se bonifie au fil de ces suppléments.

Voyons donc ensemble ce que contiennent ces trois nouveaux ouvrages.

Le livre du joueur

Alors que nous sommes habitués aux livrets des joueurs de quelques pages, ici le terme livre n’est pas galvaudé. Car nous avons à faire à un recueil de 136 pages, tout couleurs, format A4. J’utilise le terme recueil car il contient toutes les informations techniques utiles au joueur : feuille de personnage, création de personnage détaillée (reprenant les profils de tous les suppléments parus, Minos inclus), un résumé des règles importantes et celle de progression de personnage, une liste d’équipement et la (longue) liste des arcanes.

Chaque profil est présenté sur 2 pages : description et caractéristiques d’un côté. Une illustration pleine page de l’autre.

Ici, pas de chichi : il n’y a pas de texte d’introduction à l’ouvrage, de présentation de l’univers ou de cartes du monde. Mais un sommaire détaillé et un index sont là pour vous aider à vous y retrouver (ouf).

Arelate, la cité éternelle

Présenté sous la forme d’un livret de 44 pages couverture souple, la cité d’Arelate est le point de jonction entre les cultures celtes et minoenne. Autant dire que son histoire est riche en conflits et que la cité à eu l’occasion de changer de camp leader de nombreuses fois, ce qui fait aussi sa richesse culturelle et ethnique. Même si elle est très influencée par la culture romaine. D’ailleurs, le second surnom d’Arelate est la petite Rome.

Les PNJ importants ont droit à leur page dédiée : présentation et statblock

Les vingts premières pages décrivent les principaux bâtiments (Forum, Temple, Amphithéâtre, Thermes, Lupanar, …) accompagnés de leurs principaux occupants et de quelques idées d’aventures. Un scénario, très détaillé et se déroulant 2 ans après le Ragnarök, conclut le supplément. Dans ce dernier, les PJ devront enquêter sur le meurtre du fils d’un membre du conseil de la ville.

Minos

On termine avec le vrai supplément de ces sorties Darkrunesque : Minos. Un supplément de 208 pages (A4, tout couleur) qui présente le vaste, riche et influent empire minoen comprenant l’Italie, la Sicile, la Grèce, la Crète, la Macédoine, etc.

L’ouvrage débute avec l’histoire de l’empire. Ses changements importants aux rythmes et conséquences des guerres (avec, parfois, l’intervention des Dieux). On y retrouve d’ailleurs une référence à Viriathe, l’homme qui est au centre du scénario inclus avec l’écran du jeu. L’entrée en matière est un peu rude, parce qu’il y a beaucoup d’information à ingérer. D’autant que les noms des villes sont dans la langue d’époque (Athènai = Athènes, Korinthos = Corinthe, Thébai = Thèbes, …). Ce qui demande une petite gymnastique de l’esprit pour les non-initiés (dont, vous l’avez compris, je fais partie).

La suite est, je vous rassure, plus accessible et aussi plus directement utilisable en jeu. On y survole toutes les régions et ville de l’Empire à travers leur politique, leur religion, confréries et ordres, etc. Alors, certes, dans l’ensemble c’est très succinct (ce qui est compréhensible vue l’étendue du territoire à couvrir), mais ça donne une bonne vision globale de l’ensemble. Le tout est accompagné d’un « bout de carte » pour situer la ville ou la région abordée :

Cerise sur le gâteau, dans cette partie, parmi ces descriptions, quatre pages sont consacrées à la cité mythique de l’Atlantide. Dommage que cette partie se contente d’une présentation conventionnelle au détriment de l’aspect ludique. ça aurait pu être intéressant et inspirant de donner une vision fantasmée de l’Atlantide version Darkrunes : est-ce qu’il est possible de calmer la colère de Zeus pour éviter le cataclysme que connu la cité ? Est-ce que l’orichalque, le métal qui ne s’exploite qu’en Atlantis, ne serait pas le seul métal qui serait capable de tuer une créature légendaire ? Bref, ça manque un peu d’épique dans tout ça. Il faudra attendre la présentation du Panthéon et le bestiaire pour avoir cette surcouche mythologique qui fait défaut au reste du supplément. Là encore, il faudra que l’inspiration ludique vienne du MJ.

Il y a d’ailleurs un point qui m’a un peu embêté dans la présentation du Panthéon. Pour rappel, Darkunes est un jeu où se mélange de manière jouissive les cultures, mythes et dieux vikings, gaulois, romains et grecs. Et toutes la chronologie se base sur le Ragnarök (l’an 0 du calendrier étant l’avènement du Ragnarök). Or le Ragnarök est un événement issue de la mythologie nordique. D’ailleurs, la campagne éponyme publiée pour le jeu se déroule principalement dans les pays scandinaves et nord européens. Je suis donc surpris que le Ragnarök ne soit pas évoqué dans ce supplément. Comment les Dieux grecs réagissent face à cet événement ? La réponse se trouve dans la chronologie générale, résumé en une seule ligne :

-2 Avant la fin du Ragnarök : En fin d’année, les dieux de l’Olympe repoussent la grande armée du Ragnarök qui cherche à franchir la porte des dieux.

An 0 : Fin du Grand-hiver et du Ragnarök

On a un peu cette sensation que Minos est isolé du reste de l’univers de Darkrunes. Que c’est un jeu et un univers à part entière qui fait fit du reste. Seul le supplément Arelate (cf. ci-dessus) comble une partie de ce manque.

Minos est une excellente présentation synthétique de la culture grecque au sens large (géographie, culture, mythologie). Mais malheureusement, il se contente de n’être que cela. Où est le souffle épique ? Quelle est la place des PJ dans ce vaste monde ? Où sont les pistes ludiques qui font, ou feront, la particularité de Darkrunes ? Bref, en quoi Minos se démarque d’un Mythic Battle Pantheon ou d’un Antika ?

Prenons l’exemple des automates d’Héphaïstos, présentés dans le bestiaire : un tiers de page les présente tels qu’ils existent dans la mythologie classique. Point. Alors qu’il « suffirait » d’un petit paragraphe pour offrir des pistes de jeux. Est-ce qu’un Dieu Celte est jaloux de ce savoir ? Est-ce que les PJ peuvent être missionnés pour voler un automate et le ramener Gaule ou en Germanie ? Est-ce qu’il existe une armée de guerrier automates, comme dans Hellboy II, mise en lumière pendant le Ragnarök et maintenant endormie, qu’une civilisation non-minoenne souhaite retrouver et contrôler ?

Bref, je trouve dommage que les auteurs n’aillent pas au bout de leur démarche, qu’ils n’exploitent pas plus le terreau ludique épique qu’ils ont entre les mains, pour se contenter d’un univers connu sans identité propre.

Ah non, attendez !

A la fin du livre, la page 202 me contredit. En effet, on y trouve 11 synopsis de scénario (voire de campagne) présentés en une phrase ou un court paragraphe. Mais oui ! C’est ça qu’on veut ! Pourquoi ne pas en avoir mis partout des idées comme ça ?

Exemple, toujours dans le bestiaire, une page présente les Érinyes de manière, là encore, très scolaire. Alors qu’en page 202, on trouve :

La sœur d’une des nombreuses victimes des personnages est une puissante prêtresse de la déesse Nemesis. Elle va lancer une malédiction sur eux (pour avoir tué son frère ou sa sœur) en invoquant la vengeance des Érinyes. L’une d’elles va prendre les personnage en chasse.

Pourquoi ces trois phrases ne sont pas dans le bestiaire ? Cela aurait rendu la lecture de l’ouvrage beaucoup plus inspirante.

Mais je vous rassure, l’ouvrage se conclut par deux scénarios qui rendent le contenu de ce dernier tout de suite exploitable quand même.

Le Fléau d’Héra : où les PJ devront éliminer un monstre qui terrorise une cité avant qu’un sacrifice ne soit commis.
Les jeux de Poséidon : ce dernier est un long scénario où les PJ sont recrutés pour participer à l’équivalent des jeux olympique. Mais ce serait bien trop simple si toutes les épreuves que les personnages devront affronter ne se situaient que dans l’arène…

LIENS :

La critique du livre de base

La critique du supplément Ragnarok

Une pensée sur “Inspirés par la spirale ? [chronique suppléments Darkrunes]

  • 19 février 2023 à 18:24
    Permalink

    Petite précision : les livres en version spirale (et Arelate en version agrafée) sont disponibles directement auprès de l’éditeur.
    En parallèle, « Minos » peut être commandé en POD chez Lulu.com en version couverture rigide classique.

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