Si ça saigne, c’est que ça peut se soigner – Monster Care Squad prend son traitement en VF

Le Studio Absinthe a confié au Fix plancher sur la traduction de Monster Care Squad, où les monstres ne sont plus des sacs à XP à anéantir, mais des créatures divines dont la maladie menace la communauté. Le travail est en cours et ne sera pas ralenti par une souscription, je suis allé regarder pour vous le jeu original.

Une compagnie de guérisseurs de monstres

Explorer l’hexagone, traquer un monstre, évaluer la menace, lui éclater la gueule et récupérer ses possessions, tel est le lot commun de l’aventurier errant. Monster Care Squad propose très exactement l’inverse : protéger sa communauté, aller à la rencontre du monstre, le diagnostiquer, mettre au point un remède et entrer en connexion avec lui.

À rebours de D&D, le monstre n’est pas ici un dragon capitaliste amassant son or au détriment du monde, mais une créature divine, une force primaire de la nature apportant fertilité et bonheur à la communauté qu’il protège. Quand ces bienfaits se tarissent, la dite communauté missionne donc une jeune compagnie d’acupuncteurs, chirurgiens, pharmacologues et autres psychothérapeutes pour le soigner. Charge à eux de trouver les remèdes appropriés et de juguler le mal, sans quoi la blessure du monstre se commuera en blessure du monde et apportera son lot de catastrophes. La compagnie prend le risque d’approcher une bête blessée, dont les plaies sont dangereuses, avec force coups malencontreux, jets de lave et flux corrupteurs. Une fois les origines du mal trouvées et le remède administré, une partie des pouvoirs divins peut être accordée aux personnages. Qu’on se rassure donc, si l’on n’occit plus les monstres, ils rapportent quand-même des XP !

Une séance d’acupuncture qui a mal tourné ?

Et in Arcadia ego

Vue sur une communauté bienveillante et partageuse

Monster Care Squad annonce un monde paisible, sans colonialisme ni capitalisme triomphant. Il n’est pas ici question d’explorer le Chult et de cartonner ses monstres primitifs et ses hostiles autochtones en s’ensauvageant à la manière d’Au cœur des Ténèbres – oui, au Fix, on arrive à citer le module Tomb of Annihilation et la nouvelle de Conrad qui inspira Apocalypse Now dans la même phrase. La guerre est un concept très abstrait et l’économie ne repose pas sur l’accumulation d’un capital de pièces d’or mais sur l’entraide. À lire un pitch comme celui-là, on se dit que les PJ vont se la couler douce et ne rencontrer aucune opposition dans ce petit paradis, mais voilà, il y a l’or fourbe, qui blesse et corrompt les monstres. Vous aurez saisi la métaphore. Trois factions sont suspectées de l’avoir introduit dans le monde, mais elles ne sont pas au cœur des intrigues, du moins pas dans le jeu comme il est pensé. C’est en effet la quête du soin qui est ici centrale.

Un jeu à haut coefficient de mignonitude…

S’il a le bon goût de ne décalquer ni l’univers graphique ni le Japon rêvé des studios Ghibli, Monster Care Squad s’en rapproche inévitablement par sa thématique résolument animiste et son rejet d’une modernité forcément néfaste. Ald-Almura est en quelque-sorte le monde d’avant la mort du Dieu-Cerf de Princesse Mononoke. Le temps des kamis n’est pas terminé, mais, comme à la fin de l’œuvre de Miyazaki, les blessures des monstres menacent l’équilibre du monde, voire le corrompent ou le détruisent. Reste à savoir si les PJ sauront mettre en échec les dames Eboshi de leur monde ou, comme Chihiro au cours de son fabuleux voyage, soigner le dieu du fleuve.

Un petit point commun avec une œuvre majeure

… motorisé par l’Apocalypse

Je ne vais pas trop entrer dans les détails du système, dans la mesure où les lignes risquent de bouger lors du passage à la VF. En VO, côté PJ, c’est une apocalypserie sans livret, qui fonctionne sur une combinaison de traits, chacun étant l’équivalent de l’action déclenchée par des circonstances fictionnelles précises. Côté MJ, les blessures des monstres tiennent lieu de compteur de menaces, avec bien sûr une gradation qui va de petits dégâts locaux en début d’horloge à des catastrophes généralisées en fin de compteur. Les actions des PJ feront reculer ces compteurs de menace à mesure qu’ils apporteront les soins adaptés. Il ne restera plus qu’à faire du monstre un ami.

Le temps de la connexion

Que manque-t-il à mon info ? Une date de sortie peut-être ? C’est toujours difficile pour un éditeur d’en donner sans parjure mais on doit pouvoir tabler sur une sortie directe, sans financement participatif, à l’automne.

Comme toujours chez Absinthe, le jeu sera d’abord publié en .pdf sur itch.io, en couleur, puis en impression à la demande sur lulu, en couverture rigide et en noir et blanc.