Geek Junior

Non, lui a largement passé l’âge de fréquenter le système scolaire (même si, par bienveillance, on cachera à nos lecteurs son âge réel) mais Franck Plasse (Les XII Singes) est bien l’homme qui se cache derrière le foulancement en cours du hors-série spécial JdR de Geek Magazine. Or, une question qui nous taraude, c’est de savoir si on va pouvoir édifier les foules de jeunes blanc-becs avec ça et si tous vont ainsi devenir instantanément rôlistes. C’est entre autres pour en savoir plus à ce propos qu’on a voulu interviewer Franck sur son travail sur ce hors-série.

 

1. Pfff mais je comprends plus rien, moi : une association entre les XII Singes et Mnémos, c’est pas Ludika normalement ?

Oui, c’est bien ça. Ludika « marque » un produit réalisé ensemble et édité par l’un ou par l’autre. Là, c’est un peu particulier puisque l’éditeur est Geek Magazine. On peut dire que c’est un partenariat Geek Mag – Ludika, mais c’est plus compréhensible de dire Geek Mag – Mnémos – Les XII singes.

2. Quel est le rôle exact joué par Geek Mag’ dans ce projet : c’est un commande de leur part ou c’est toi qui les as tanné jusqu’à ce qu’ils cèdent ?

A l’origine, c’est un projet de Mnémos et des XII singes, Ludiverse, visant à proposer des romans comme cadres de jeu, des règles simples, des personnages prêts à jouer et des petites campagnes de scénarios courts. J’ai ça en tête depuis la création de Ludika, et ça a été parmi les premiers trucs réfléchis et testés avec Mnémos. Nous cherchions la meilleure forme et nous en avons parlé à l’équipe de Geek Magazine suite à l’entremise de l’un de leurs rédacteurs. Ils ont immédiatement été partants ! Il faut dire que leur rédacteur en chef est lui-même rôliste.

3. C’est quoi le modèle le plus inspirant dans ce qui est déjà paru dans le registre : MEGA ? Simulacres (le Hors-Série de Casus Belli) ? Basic (idem) ?

Sans doute Basic et Simulacres, même si ces anciens hors-séries mettaient en avant un système de jeu, puis le déclinait. De notre côté, nous mettons plutôt en avant les aventures, en proposant trois univers de jeux différents et une campagne de trois scénarios pour chacun d’entre eux. Et Simulacres, pour une autre raison, puisque le système de jeu est basé sur ces règles.

4. Mais… euh… Simulacres, c’est un système de jeu qui date de la fin des années 1980. Cela veut dire que vous n’avez rien trouvé de mieux dans les dizaines de systèmes publiés et utilisés par les XII Singes ?!

Et encore, imagine si on avait choisi Basic, c’était carrément le début des années 1980… Plus sérieusement, il nous fallait un système de jeu court – là, on est à 2 pages de règles pour les joueurs et 6 pour le MJ -, simple et dans l’air du temps. En utilisant des pictos, qui nous entourent de toute part aujourd’hui, Pierre Rosenthal, le créateur de Simulacres, était très en avance. D’où notre choix. On a simplifié néanmoins un peu les choses et surtout supprimé les lancers du dés du MJ qui peut ainsi se concentrer l’animation de la partie.

5. Comment s’est faite la sélection des trois univers de jeu ? C’est Mnémos qui a imposé la liste ?

On l’a fait ensemble. On avait une petite liste de critères : des univers différents les uns des autres, qui avaient déjà recueilli l’approbation du public en tant que romans et dont les auteurs adhéreraient au projet et le faciliteraient. On a testé sept univers différents et au final la Panam steampunk des aventures de Sylvo Sylvain, le med-fan façon Renaissance des Chevauches-Brumes et la SF du cycle du Janissaire et de Nemrod se sont imposés.

6. Cela semble un chouette outil d’initiation mais… des univers adaptés de cycles de gros bouquins sans images, est-ce idéal pour attitrer un nouveau public vers le JdR ? Les jeux vidéos, les séries TV, les comics… ça semble plus accessible, non ?

Comme il s’agit d’un partenariat avec Mnémos, c’est plus logique d’avoir pris comme base leurs romans, non ?

Plus sérieusement, l’accessibilité n’est pas seulement attirer, c’est aussi permettre et faciliter l’usage. Il y a ainsi des jeux de rôle basés sur des jeux vidéos qui sont tout sauf accessibles à un nouveau public… Et certes, la lecture est en perte de vitesse, mais ne tombons pas dans le cliché des jeunes qui seraient tous et systématiquement étrangers  aux livres. Mnémos a un lectorat Young Adult qui n’est pas négligeable.

Enfin, si faire des jeux de rôle à partir des blockbusters d’autres médias est une bonne idée marketing, est-ce qu’en revanche essayer de faire des ponts entre romans et JdR n’est pas une belle idée ? En tout cas, ça nous séduit et on a de nombreux retours positifs ! Quand un souscripteur nous dit qu’il a découvert le cycle de Sylvo Sylvain grâce à ce hors-série et qu’il est en train de se régaler avec le premier tome et qu’il a hâte de pouvoir jouer dans cet univers, ça nous vraiment plaisir.

7. Dans le même ordre d’idée, est-ce que les jeunes lisent vraiment Geek Mag’ de toutes façons ?

Ce n’est pas le cœur de leur lectorat. Mais dans celui-ci, il y a des rôlistes qui peuvent avoir envie de jouer en famille, de faire découvrir leur loisir à leurs amis, de s’y remettre sans prise de tête après des années, etc. Ou des non rôlistes qui sauteront le pas parce qu’on leur aura proposé quelque chose de séduisant et d’accessible.

Et l’exposition de ce hors-série ne sera pas uniquement en kiosque, mais par exemple Mnémos ou Les XII singes l’auront sur les divers évènements auxquels nous participons, pour certains assez grand public.

8. Au final, Geek Mag’ est le dernier magazine papier présent en kiosques qui parle (un peu) de JdR : tu en penses quoi, toi ?

Hélas, ce n’est sans doute pas le JdR qui permet à Geek Mag d’être en kiosque, je pense que c’est une composante secondaire de leur magazine. Et c’est d’autant plus chouette qu’ils aient validé de faire un hors-série dédié !

9. JdR Mag’ puis, dans la foulée, ce hors-série : la nécessité pour les mags de JdR de passer eux aussi par la case foulancement, cela dit quelque chose sur le marché ou bien ?

Ce sont deux opérations très différentes. Geek Mag finance tous ses hors-séries sous cette forme, comme une opération spéciale. Et ce hors-série a été financé facilement, dans la soirée du lancement.

Sinon, au-delà de ce hors-série, je trouve que le financement participatif est quand même assez proche d’un abonnement : l’acheteur prend le risque de payer avant pour l’avoir pendant telle ou telle durée. Or l’abonnement, c’est la base vitale d’un magazine. Et comme l’économie actuelle du JdR tient actuellement sur le financement participatif, cela ne m’étonne pas que les magazines y aient recours.

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