Into The Odd

Note: Cet article ne traite que du livre de base d’Into The Odd. Le contenu des autres suppléments et ce qu’ils apportent au jeu sera abordé dans de prochains articles.

 

Habitués aux créations françaises, les XII Singes se font occasionnellement plaisir en partageant avec les rôlistes francophone leurs coups de cœur ludiques. Plus que de simples traductions, ces éditions sont enrichies d’aides de jeu et de conseils sur la façon dont les Singes appréhendent le jeu et y ont joué. C’était le cas pour Dieux Ennemis et c’est le cas pour Into The ODD, leur dernier coup de cœur traduit.

Deuxième incursion dans le petit monde de l’OSR (après Les catacombes de la ville morte), Into the ODD a bénéficié d’une édition soignées, à la hauteur de la considération que lui porte l’éditeur (et ce, aussi grâce à une souscription réussie) : livre de base tout en couleurs, ajout de nombreuses pages de conseils, huit suppléments déjà parus. Bref, l’éditeur voit les choses en grand pour Into The Odd. Mais le jeu vaut-il vraiment toute cette attention ? C’est ce que nous allons découvrir ensemble.

Qu’est-ce que l’OSR ?

(attention, terrain glissant)
Avant de parler du jeu, faisons une petite parenthèse sur ce qu’est l’OSR (mouvement Old School Renaissance). Car cette notion est importante pour comprendre l’un des intérêts d’Into The Odd. La vraie définition de l’OSR est très simple et s’explique en quelques mots. Alors, l’OSR c’est…

Nan, je déconne.

Le principe de l’OSR est de retrouver les mêmes sensations de jeux que les tous premiers jeux de rôle (a ce titre, le « Odd » d’Into The Odd signifie « Old Dungeon&Dragon »). Par conséquent, vous pouvez avoir autant de définition de l’OSR que de rôlistes quarantenairse nostalgiques. Et toutes sont vraies.

Mais si nous devions nous mouiller (même pas peur !) et en donner une, je dirais que l’OSR, plus qu’un système, c’est avant tout une manière de jouer : explorer, éviter des pièges, éliminer des monstres et trouver des trésors. Les bases du dungeon crawling. Mais sur cette intention de jeu, chaque jeu viendra y greffer un système souvent simple, moderne, voire même saupoudré de narrativisme. Et c’est là toute la force d’Into The Odd : refaire vivre cette madeleine de Proust qu’est l’OSR tout en proposant un jeu aux mécanismes modernes et novateurs.

Terrains de jeux et lieux de morts

Première particularité d’Into The Odd : oubliez le med-fan. Le jeu prend place dans un univers inspiré de notre monde des XVIIIe-XIXe siècles dans une ville très industrialisé appelée Bastion. Usines, bateaux à vapeur, mousquets, tricornes, organisations puissantes, tels sont les mots clés qui définissent l’univers visuel de Bastion. Vient s’ajouter à cela un aspect « cosmique » : les extra-terrestre existent (ou ont existé ?) et les joueurs auront l’occasion de trouver certains de leurs artefacts oubliés. Tout ces objets (magique ? mystique ? scientifique ?), appelés Arcana, sont le cœur du jeu. Le but, pour les PJ, étant d’explorer les (nombreux) souterrains de la ville ou le monde lointain, éviter les pièges, tuer les monstres et trouver ces précieux artefacts pour après les revendre ou, pourquoi pas, monter leur propre organisation (les règles sont fournies). Il y a un petit côté Stalker dans Into The Odd fort appréciable.

Exemple d’Arcana : Boule des cinq démons : briser l’orbe fait apparaître cinq terrifiants oiseaux de feu [Caractéristique complète fournie dans le jeu]. Si les cinq oiseaux sont tués, la boule se reconstitue dans le corps de leur dernière victime.

Malheureusement pour les personnages, tout n’est pas si facile et leurs explorations ne seront pas des parties de plaisir. Comprenez-le bien : Into the Odd est TRÈS mortel. Prenez la folie d’un Appel de Chtulhu, les pièges de Donjons & Dragons et la noirceur du monde de Warhammer et vous avez une petite idée de ce qui vous attend dans Bastion. Et cette dureté se traduit surtout à travers le système de jeu : durant un combat vous appliquez directement les dégâts moins l’armure du défenseur. Point. Terminé. En sachant que vous commencez le jeu avec 1D6 PV, ça vous donne une idée de votre espérance de vie.

Et toute la mécanique du jeu se résume à ça : faire face à la difficulté. Dans un jeu de rôle classique, le joueur doit faire un jet de dé s’il y a un risque d’échec. Un aventurier qui se retrouve devant une porte fermée doit faire un test de Dextérité (pour la crocheter) ou de force (pour la défoncer) pour que son action aboutisse et qu’il puisse passer la porte. Dans Into the Odd, oubliez tout ça. Une porte verrouillée peut être ouverte. Au joueur de choisir et de décrire comment. Par contre, à partir du moment où il y a une menace (le PJ est poursuivi), c’est à ce moment là que le joueur fait un test de sauvegarde (1D20 sous la caractéristique appropriée). Si le résultat est égal ou inférieur, c’est une réussite. Si c’est un échec, je rappelle que le poursuivant ne fait pas de test pour toucher mais applique directement les dégâts.

Exemple de monstre : Chasseur étrange : traque des proies qui en valent la peine. Ne parle qu’un langage étrange. Porte, montée sur son épaule, une arme à rayon [Caractéristique fournie dans le jeu] et manie une lame courbe exotique.

Je suis ce que je possède

Heureusement, le taux de mortalité est compensé par le fait que la création de personnage soit TRÈS rapide. Le temps de jeter quelques dés, noter les résultats sur la feuille de personnage, réajuster son tricorne et on est reparti.

Concrètement, cela donne quoi ?

Votre personnage est défini par trois caractéristiques dont la valeur est déterminée par la somme de 3D6 :
– Force pour tout ce qui concerne combat, vigueur et résistance
– Dextérité pour les tests de discrétion, athlétisme et réflexe
– Volonté pour la confiance, discipline et charisme.

Vos points de vie sont déterminés par 1D6.

Ensuite, vous prenez la valeur de votre caractéristique la plus élevée et la valeur de vos points de vie pour définir votre équipement de départ.

Voilà. Votre personnage est créé.

Il est faible et ce n’est pas la monté de niveau qui vous fera jouer Gros bill. Non. Si vous voulez devenir puissant, résistant ou tout simplement survivre, il va falloir explorer et trouver les bons Arcana.

Pas de secret, mais plein de mystères

Autre point fort du jeu : les textes de description, pour les Arcana, les monstres ou les lieux sont très évocateurs – tout en restant mystérieux (j’ai mis un exemple de chaque dans cet article pour vous donner une idée). Un monde qui se dévoile à travers ses objets, ses monstres et ses PNJ, cela parlera sans aucun soute à tous les amateurs de Dark Souls.

Exemple de lieu : Les contre-allées : Rues faiblement éclairées, patouillées par la milice quand elle s’en donne la peine. Un culte vénérant la Sorcière des mers dresse un sanctuaire écœurant chaque nuit.

Que de qualité pour un si petit jeu ! Les XII Singes ont-ils vraiment eu un si bon flair pour nous proposer le jeu parfait ?

Hmmm…. presque.

J’ai adoré Into the Odd. Tant le jeu que le travail éditorial fourni par les XII Singes pour rendre le jeu accessible : exemple de partie, note d’intentions, conseils de mise en pratique, etc.

Mais il reste tout de même difficile, pour le meneur, d’appréhender cet univers en kit. Toute la ville est proposée sous forme de tableaux aléatoires. Très variées et très évocatrices (liste de figurants, a quoi ressemble une rue ?, suggestion de chemin le plus rapide pour traverser la ville, liste de décisions hallucinantes du haut conseil, etc.), ces tables ne donnent pas de direction claire pour un meneur débutant. Il faudra que chacun autour de la table fasse preuve de créativité pour faire coller les morceaux ou combler ces « vides ».


Sachez toutefois que vous trouverez dans Into The Odd deux aventures. Chacune vous donnant un aperçu de la façon de préparer vos parties. La première aventure est du dungeon crawling, tandis que la seconde est un voyage à ciel ouvert.

Malgré cela, la lecture d’Into The Odd donne furieusement envie d’y jouer. On a envie de mettre en scène tel monstre, de mettre en compétition les PJ avec telle guilde, de mettre en place un trafic d’Arcana pour riche collectionneur. Bref, Into The Odd est un terreau propice à l’aventure et il n’attend plus que vous pour germer et capturer vos explorateurs dans ses racines tentaculaires.

Merci aux XII Singes pour avoir traduit ce bon jeu et pour cette belle édition. Et quand on sait que les suppléments parus ne font qu’enrichir le jeu, vous auriez tort de vous priver.

Mais nous verrons cela dans un prochain article.

4 pensées sur “Into The Odd

  • 21 novembre 2017 à 19:07
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    Quarantenairse c’est gentil !!

  • 24 novembre 2017 à 17:47
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    C’est le même Vincent que sur Roliste TV ? Parce que ce sont les même arguments.
    Perso, je trouve le jeu extrémement cher pour ce qui est proposé.

  • 25 novembre 2017 à 11:28
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    Bonjour,

    Non, ce n’est pas le même Vincent (même si je pense qu’il en faut un dans chaque équipe si on veut que ça tourne un minimum :-)) et je n’ai pas encore vu la vidéo de rôliste TV pour ne pas être « influencé ». Mais ce retour m’intrigue. Je vais aller la regarder des que possible.

    Nous allons, sur le fix, détaillé chaque supplément pour bien dégager les points positifs et négatifs de chacun.
    Libre apres à chacun d’acheter selon ses gouts et ses envies.

    A bientôt pour découvrir ensemble la suite de la gamme,
    Vincent (l’autre du coup :-))

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