Je vous le dis sans détour…

Vous nous connaissez : nous sommes volontiers taquins au sujet des foulancements. Leur retard, leurs goodies moisis, les recours abusifs à cette pratique pour financer la Xième édition d’un jeu ou d’un supplément pourtant connu comme le loup blanc, etc.

Pourtant, un récent cas d’école nous ramène brutalement à la raison économique et nous oblige à poser la question : peut-on encore décemment publier du JdR francophone sans recourir au crowdfunding ?

Ce cas, c’est celui de la publication de l’excellent Mutant : Year Zero en VF par Sans-Détour.

En effet, bien que habituellement peu timide en la matière, SD avait décidé à cette occasion de publier directement le jeu, sans passer par la case Ulule. Et à l’époque, nous nous en étions réjouis. De fait, le jeu est sorti à peu près dans le timing annoncé sous la forme d’un beau et bon bouquin à prix raisonnable et bien distribué dans toutes les boutiques de France et des environs. Très bien. Parfait, même.

Hélas, le problème est que depuis les fans du jeu attendent désespérément des nouvelles de la gamme.

Oh, rassurez-vous, dans les autres langues, le jeu se porte comme un charme. Sans remonter jusqu’à la gamme originale en suédois, la gamme anglaise, elle, possède toute une série d’accessoires, des livrets pour étendre le jeu et même d’un spin off… qui lui-même possède ses propres accessoires et livrets. Chez nos voisins espagnols même, le célèbre éditeur NoSoloRol a déjà publié, outre le livre de base, l’écran du MJ et deux Manuels de Zones en version papier. Il assure aussi la distribution des dés spéciaux.

Or, c’est bien là que le bât blesse. Mutant : Year Zero, sans avoir une gamme pléthorique, est un jeu qui appelle à l’achat de matériel complémentaire : dés, cartes, suite de la campagne officielle présentée dans le livre de base, etc. Sans tout ça, le jeu perd une grande partie de son sel.

Bon, OK, pour les dés, on peut les acheter n’importe où, il n’y a pas de « localisation » (comme on dit joliment dans le monde des jeux vidéo…). Mais, pas distribués directement par l’éditeur, ils ne sont pas si aisés à trouver.

Surtout, l’absence de cartes est préjudiciable. Il est toujours possible de lancer des dés sur des listes incluses dans le livre de base mais cela n’offre pas du tout la même expérience de jeu (« hum… et si le MJ disait juste ce qui l’arrange ? ») et ne permet pas la même souplesse d’utilisation (ne pas tomber sur des doublons, pouvoir retirer de la liste les mutations que l’on ne sent pas trop, etc.).

De même, MYZ est un jeu qui comporte une phase d’exploration « sandbox » pour laquelle une carte et des jetons apportent également un confort incomparable. Bon, là aussi, pas vraiment besoin d’une traduction mais plutôt d’une solide distribution.

Or, tout cela risque bel et bien de passer par pertes et profits. SD a seulement annoncé la parution de l’écran du MJ… sans guère donner de date. Peut-être un an après la sortie du jeu, cela risque de toute façon de faire tard.

Ce qui est rageant, c’est que l’on avait donc là un jeu qui semblait calibré pour voir ses accessoires financés puis distribués par crowdfunding… et hélas, c’est un des rares jeux de ces dernières années à ne pas avoir été foulancé.

Dommage.