La plume est plus forte que l’épée

A travers ses jeux, l’éditeur Odonata a su nous surprendre (Insectopia) ou nous enthousiasmer (Omega). Alors que son dernier bébé (Sapa Inca) vient de sortir en boutique, l’éditeur continue d’étendre son catalogue avec une nouvelle création française, un jeu signé Téo Chailloux, baptisé les Chroniques de Vaelran. On vous en avait déjà parlé il y a un peu plus d’un an, mais là, le projet se concrétise puisque sa souscription démarre ce mardi 30 Avril.

Le Fix : Bonjour, nous c’est le Fix. On s’y connaît plutôt bien en rédaction d’articles. Et vous, vous êtes qui ?

Florent Moragas (FM), auteur d’Insectopia et Oméga, éditeur chez Odonata éditions et Téo Chailloux (TC), l’auteur des Chroniques de Vaelran. Avec le temps, on s’y connaît plutôt bien en rédaction de jeu 😉

Le Fix : Odonata éditions semble mettre un point d’honneur à la création. Qu’est-ce qui vous a plu dans les Chroniques de Vaelran ?

FM : Odonata, c’est d’abord un studio de création avant d’être une maison d’édition. Aujourd’hui nous avons étoffé notre expérience d’éditeur avec un catalogue qui s’agrandit (Insectopia, Oméga, Sapa Inca), mais la création reste dans notre ADN. Alors oui, c’est un point central ! La création !
Ce qui m’a plu dans Vaelran, c’est la créativité autour d’un univers Medfan, réinventé avec de la Modern Hard Fantasy, mais aussi, et surtout, la possibilité de modifier l’histoire, d’être un acteur complet de l’histoire que l’on joue.

Le Fix : Depuis Insectopia, vous avez édité Omega, ou plus récemment Sapa Inca. Avec ce chemin parcouru, est-ce que votre processus créatif a évolué ? Avez-vous travaillé différemment pour écrire ce nouveau jeu ?

FM : Le processus créatif a évolué dans ses objectifs, qui sont plus clairs et plus précis. On a gagné en expérience ! Cela se voit dans la construction des ouvrages et le fait que nous cernons plus le propos. Personnellement, l’évolution tient surtout à devenir véritablement éditeur, chef de projet, d’assurer toute la réalisation d’un ouvrage, y compris le conseil créatif qui est au cœur de notre processus, ce vers un auteur qui gère son projet. Avant j’étais aussi auteur, ce qui simplifiait les choses. Depuis j’arrive bien à superviser et conseiller.
Chaque projet est unique. Suivre Téo dans sa réalisation fut très intéressant et instructif également.

Le Fix : De loin, le jeu semble avoir quelques points communs avec Château Falkenstein (l’époque, les peuples, le fait d’écrire ses chroniques). Quels sont les points forts des Chroniques de Vaelran ? Et pourquoi devrais-je m’y intéresser, moi qui ai déjà Château Falkenstein ?

FM : Chateau Falkenstein est un steampunk qui s’inscrit à la fin du 19ème siècle, dans un monde très inspiré du notre. Les Chroniques de Vaelran, c’est un Fantasy fin 18ème (dans son inspiration) qui propose de s’impliquer dans l’histoire d’un monde imaginaire de par son propos et ses mécaniques.

Le Fix : Quelle légitimité les personnages ont-ils pour intervenir, mener une enquête, voire être acteur dans des choix importants ? Ça dépasse le cadre de simple journaliste, non ?

TC : Officiellement pour le monde de Vaelran et les États, ils n’ont aucune légitimité à intervenir et ce n’est pas censé être leur rôle. En revanche, enquêter fait partie du métier de journaliste (d’investigation), et c’est justement parce qu’ils ont tendance à enquêter que certains pays ne les apprécient pas beaucoup, voir les surveillent. Quant au fait d’être acteur, les Chroniqueurs restent des acteurs de l’ombre, tirant les ficelles depuis les coulisses, évitant au mieux de s’exposer. Quand ils le peuvent, ils utilisent des intermédiaires, des hommes de paille, et jouent de leurs influences pour diriger les choix. Autrement, ils effacent au mieux leurs traces.

Le Fix : Les chroniqueurs travaillent à la construction de l’utopie. Mais concrètement, pour les joueurs, ça se présente comment ? C’est une liste d’objectif à atteindre que les joueurs définissent avant de jouer ?

TC : Le livre de base proposera plusieurs axes de réflexion sur les sociétés de Vaelran. Tout n’est pas tout beau, il existe de nombreuses injustices, inégalités et plus largement des conflits latents dans le monde, et de nombreuses accrochent scénaristiques seront proposés pour permettre aux MJ de construire des objectifs. Les Chroniqueurs peuvent aussi agir indépendamment, et au cours d’une aventure, les joueurs peuvent très bien décider avec le MJ de s’orienter vers tel ou tel aspect de l’univers pour entreprendre une campagne unique.

Un autre point est que les Chroniqueurs réagissent aussi à ce qui se passe dans le monde. Ils veillent aux évènements qui se produisent hors de leur contrôle (où qu’ils n’ont pas pu contrôler) pour rectifier le déroulement. Ils sont en quelque sorte des gardiens de l’ombre de la préservation du monde.

 

Le Fix : Toujours concernant cette utopie à atteindre, est-ce que le meneur aura une sorte de jauge à gérer à la fin de chaque scénario ?

TC : Absolument pas. L’Utopie est un objectif long à construire, demandant des progrès sur les plans sociaux, culturels, politiques et scientifiques. C’est donc un projet millénaire, l’Ordre des Chroniqueurs travaille déjà sur ce point depuis 1000 ans, et il faudra probablement encore plusieurs siècles pour espérer l’atteindre. Les Chroniqueurs le savent, ils agissent à construire un monde qu’ils ne connaîtront probablement jamais, ils le font pour les générations qui leur succéderont.

Le Fix : Quel sera le terrain de jeu des chroniqueurs ? Doivent-ils également apporter l’utopie aux états voisins ?

TC : Le livre de découverte propose un cadre qui se restreint au royaume de Velu, mais le livre de base ouvrira sur l’ensemble de Vaelran, tous les États y seront décrits. L’Ordre des Chroniqueurs agit à l’échelle mondiale, c’est donc une entreprise de grande envergure, l’Utopie ne peut se construire qu’à l’échelle de Vaelran tout entier. C’est d’ailleurs sa définition : « un monde global et unifié ».

Le Fix : De nos jours, les jeux violents ou abordant des thèmes sensibles suggèrent l’utilisation d’une carte X. Même si Les Chroniques de Vaelran a tout du jeu grand public, il peut être perçu comme « jouer des journalistes qui manipulent l’opinion publique pour imposer un système unique ». En quoi cette impression est fausse ?

TC : À vrai dire, elle n’est pas totalement fausse. Selon l’envie de l’histoire et les joueurs, la mise en place d’une carte X n’est pas une mauvaise idée.
Les Chroniques de Vaelran parlent d’agir dans l’ombre pour manipuler et diriger l’évolution du monde, et les Chroniqueurs ont un credo très simple : la fin justifie les moyens, car la fin sera morale. C’est donc un jeu qui peut autant se jouer de manière grand public, avec des missions à l’esprit capes & d’épées, épique et aventureuse, que manière plus sombre et profonde en s’enfonçant dans les ramifications politiques, les dérives scientifiques et le bellicisme de certains individus cherchant à servir leurs intérêts. Qui plus est, les Chroniqueurs sont subdivisés en plusieurs groupes journalistiques : certains s’occupent des affaires politique ou scientifique, quand d’autres explorent le monde et enquête sur son passé. À la manière d’archéologues, ils cherchent les traces d’une histoire oubliée ou à vérifier la véracité des légendes pour ensuite déterminer si le monde est prêt à connaître la vérité.

Le Fix : Qui dit peuples féeriques dit magie. Qu’en est-il dans le royaume de Velu ? C’est boule de feu à tout va ou plutôt magie discrète ?

TC : La magie est omniprésente dans les sociétés vaelroyennes. Il faut bien comprendre que dans cet univers, la magie est une science faisant partie d’un grand ensemble : l’arcanologie. Le monde de Vaelran s’est donc pleinement développé avec et autour de cette science permettant de manipuler le monde. Les arcanistes ne sont pas rares, par conséquent le monde s’est construit avec eux. Il existe des systèmes de sécurités anti-magie pour contrôler les risques, notamment en ville ; il existe même un Ordre chargé d’assurer la sécurité et veiller sur les dérives. En revanche, il existe une forme de magie illégale qui demandera au joueur décidant de l’utiliser d’être discret, sous peine d’avoir de gros problème.
Notons aussi que le jeu se voulant être dans un univers de Hard Fantasy, l’arcanologie répond au maximum à une logique scientifique. Mais rassurez-vous, pas besoin d’être bon en science dans la réalité pour pouvoir jouer et pleinement profiter d’un personnage arcaniste quand vous jouerez aux Chroniques de Vaelran. Le système de magie est pensé pour être accessible et dynamique, laissant une part belle à l’imagination. Le livre de base sera très complet à ce sujet, et il permettra à n’importe qui de prendre plaisir à lancer des sorts.

Le Fix : Avouer : inciter les joueurs à écrire un article à la fin de chaque mission, c’est aussi pour décharger le meneur de faire le compte-rendu, ah wé !?!

TC : Parce que c’est au meneur de faire un compte-rendu ?
En réalité, pas du tout. C’est une manière de donner au joueurs un levier supplémentaire pour influencer le cours des choses, de créer des conséquences potentielles après la partie et de donner au meneur des pistes d’écritures intéressantes. C’est aussi le moment de faire un débrief d’après partie tout en restant dans le jeu. Pendant cette phase-là, les joueurs se mettent d’accord pour établir la version officielle, celle que le peuple de Vaelran va connaître. Ils peuvent profiter de ce moment pour décider de mettre en avant des personnages en le flattant ou en le critiquant, d’embellir certaines vérités sales ou au contraire d’enfoncer le clou pour attaquer. C’est l’occasion de mettre pleinement en avant le rôle de journaliste des joueurs et d’offrir, d’une certaine manière, une réflexion sur ce métier. La presse n’est pas appelée le « Quatrième pouvoir » pour rien.

Le Fix : Fot-il être bon an ortograf pour devenire croniqueur et joué au jeu ?

TC : L’auteur étant dysclé… dyxclé… dysflé… dyslexique ! Pourquoi c’est si compliqué à écrire ? Non, mais je plaisante;)
Bien sûr que non. Vos personnages savent lire et écrire et (grâce aux Chroniqueurs) la majorité de Vaelran aussi. Les chroniques de fin de partie peuvent autant être faites à l’écrit, pour une meilleure immersion, que simplement oralisées entre les joueurs et le meneur. Si vous avez la vieille machine à écrire de mamie dans le grenier, c’est même l’occasion de la ressortir pour encore une meilleure immersion !

Le Fix : La souscription va débuter ce mardi 30 avril. Est-ce que d’autres ouvrages sont prévus, en plus du livre de base ?

FM : Il y aura le livre de base, le livre du monde de Vaelran, un recueil de scénarios et un écran. Ce sont les produits que nous proposons pour nos jeux. Pour Sapa Inca, le contenu est satisfaisant pour les souscripteurs et les nouveaux lecteurs. Nous proposons également, des jetons, des aides de jeux…

Le Fix : En dehors des Chroniques de Vaelran, quelle est votre actualité ?

FM : Nous travaillons actuellement sur plusieurs jeux…
Résilience le retour des Saisons, un post apocalyptique qui propose de jouer des élus des saisons capables de réharmoniser la nature et les peuples. Auteur : Jean-Khalil Atallah
Les Gardiens de l’Ether, une expérience chamanique dans l’espace, par Gabriel Pardon et Cyril Berger. Le jeu propose de jouer un personnage et son gardien qui évolue dans un plan extérieur et influence sa propre vie.
Normazone, écrit par Bruno Guérin, qui est un jeu futuriste où les normes régissent tout.

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