Il est des Nostromo… (air connu)

… il a son kit de démarrage comme les au-au-treuh.

Et oui, là, je crois qu’on peut dire qu’on tient un phénomène : la publication en début de gamme d’une grosse boîte remplie de petites choses qui devraient vous permettre de tenir le siège en attendant, au choix, que le jeu complet soit écrit, que son CF soit livré, que vous terminiez votre campagne précédente ou… euh… que vous trouviez des amis pour vous lancer dans celle-ci. A notre connaissance, quasiment pas une gamme récente qui en ait fait l’économie que ce soit L’Appel de Cthulhu de Edge, le Monstres de BBE, le Warhammer de Khaos Project, etc.

Ici, c’est Arkhane Asylum qui s’y colle. Pas vraiment des timides niveau kits de démarrage en boîte avec la sortie à flux tendu de celui (par anticipation) de Cyberpunk Red et celui (à retardement) de Tales from the Loop. Mais, là, on va parler de celui du très attendu Alien, du célèbre éditeur suédois, Fria Ligan.

Une première chose intrigue avec ce kit d’Alien. La boîte est magnifique, épaisse, solide, visiblement bourrée de matos. Et elle est chère. Ceci expliquant bien sûr cela. Mais, quand on dit qu’elle est chère, cela veut dire qu’elle fait pour ainsi dire le prix d’un gros livre de base dans toutes les autres gammes du marché. Alors, la problématique du positionnement de ce kit par rapport au reste de la gamme interroge. On est déjà souvent dubitatif sur la pertinence de ces kits à courte durée qui, après avoir été joué pour un ou deux scénarios (ici, il n’y en a qu’un qui plus est), sont définitivement rangés sur l’étagère du bas pour passer au jeu complet qui, en principe, annule et remplace la totalité de son matériel. Mais alors, si le kit, en plus, coûte le prix du livre de base, quel intérêt ?

Fort heureusement, ce kit de démarrage d’Alien apporte – pour une fois – de vraies réponses à cette problématique.

D’abord, la question de l’investissement. La boîte avoisine les 50 euros. C’est beaucoup. Mais une grande partie de son matériel est réutilisable. D’abord, on y trouve deux sets de dés complets (soit 20 dés à six faces en tout). Si, dans le système utilisé (une adaptation du Year Zero system comme pour la plupart des jeux Fri Ligan), ils ne sont pas strictement indispensables (on peut jouer avec des D6 en prenant en compte les 6 et les 1 et basta), ils aident quand même à une lisibilité maximum. De même, dans Alien, il faut deux séries de dés de couleurs. Des dés normaux et des dés de stress. Si vous êtes du genre à savoir que vous ne résisterez pas ultérieurement à cet achat accessoire, il est peut être raisonnable de le programmer dans le cadre de l’achat de cette boîte. Au cours actuel (certes en import), le prix des deux sets couvre quasiment… la totalité du prix de la boîte !

La boîte contient aussi un joli set de cartes à jouer. Si une partie d’entre elles (les objectifs des PJ et les PNJ) ne servira que pour jouer le scénario du starter, d’autres sont réutilisables pour toutes les parties de Alien : les cartes initiative (quasiment indispensables) et les cartes d’équipement (purement accessoires, elles).

La grande carte de l’univers de jeu imprimée sur papier très fort est aussi un accessoire facile à réinvestir (le verso est par contre réservé au scénario du kit). Elle est accompagnée d’une planche de marqueurs en carton fort. Enfin, le livret de règles, s’il est largement rendu obsolète par le gros livre de base qu’il reprend pour ainsi dire entièrement, présente au moins l’intérêt d’être plus léger (104 pages quand même avec du papier épais) que la pavasse du jeu complet et pourra servir de livret de consultation rapide par le MJ et par les joueurs.

Encore une fois, sur le marché de l’import actuel, ce seul matos réutilisable représente, acheté à l’unité, un prix bien supérieur à celui du kit. Par conséquent, à moins que vous ne soyez du genre à jouer sans accessoire, ce kit est déjà rentable rien que pour son (très beau) matos. Eh, et en plus, vous aurez une belle boîte. C’est toujours utile une belle boîte, non ?

Au-delà de la question du coût, ce kit de démarrage apporte une autre réponse au sens de la vie d’une telle boîte. Et donc, non, ce kit n’est pas juste un bundle de jolis accessoires.

La bonne idée, ici, réside dans les deux approches possibles pour jouer au JdR Alien. En effet, dès que vous proposerez Alien à votre groupe de joueurs habituel, vous aurez des remarques sur le mode « ouais, et une fois qu’on a buté l’alien dans le vaisseau, on fait quoi ? ». Pour contrer cela, l’éditeur a prévu deux modes de jeu distincts.

Le premier, le mode « Cinéma », invite en effet à jouer des épisodes de Alien, les films. Pas les films déjà existants bien sûr mais dans un registre équivalent. Oui, on sait qu’il va y avoir un alien caché dans le vaisseau/base/forêt/whatever. Et ? Après tout, quand on mate un épisode de la franchise, on le sait aussi, non ? Pour rendre l’expérience intéressante, Fria Ligan mise sur deux choses. D’une part, le grand spectacle. Pour jouer en mode cinéma, il faut avoir un plan du vaisseau grand format, des marqueurs pour indiquer l’emplacement des uns et des autres dessus, des cartes de personnages, des belles illus à montrer, etc. : bref, on s’y croirait. D’autre part, l’individualisation des PJ. Ceux-ci sont des prétirés avec leurs propres relations interpersonnelles et leur objectifs personnels (résumés sur les cartes de PJ) : de quoi alimenter du drama et des dialogues bien sentis entre deux fuites éperdues dans les coursives.

L’autre mode, dit « Campagne », repose sur l’univers étendu. Là, il n’y a pas forcément d’aliens belliqueux mais un rude monde de pionniers interstellaires qui tentent de survivre dans un environnement très hostile au milieu des intrigues des coalitions politiques et des intérêts financiers des armateurs de vaisseaux spatiaux. Une sorte de western spatial, un peu comme dans l’excellent Outland, le film. Une SF crépusculaire finalement assez rarement explorée en JdR.

Or – revenons à notre sujet – ce kit de démarrage a la bonne idée de se concentrer entièrement sur le mode « Cinéma ». Bien sûr, on s’en doutait : il n’y avait de toute façon pas la place pour les règles de création de PJ, de navigation spatiale ou de larges précisions sur l’univers que présuppose le mode « Campagne ». Mais ce constat en creux est bonifié par un choix affirmé : ce kit contient en revanche TOUT le nécessaire pour jouer en mode « Cinéma ». Bien sûr, il y a dedans un scénario de ce type – La chariot des Dieux – avec tout son matériel. Mais, qui plus est, les groupes qui voudront se contenter du mode « Cinéma » en se faisant juste un petit Alien de temps en temps n’auront pas besoin d’acquérir le gros livre de base. Astucieux.

Bien sûr, pour que cela fonctionne, il faudra fournir aux amateurs de ce mode mineur du matériel prêt-à-jouer. C’est déjà le cas en VO avec un deuxième scénario « Cinéma » appelé  Destroyer of worlds. Il est présenté lui aussi sous forme de boîte avec le livret de scénario, les fiches de prétirés, la grande carte format poster, ses marqueurs et les cartes à jouer nécessaires (PJ et PNJ) mais, bien sûr, pas le gros livret de règles, ce qui met le kit à un prix plus raisonnable (bien que cher pour un simple scénario, forcément). Arkhane Asylum a déjà annoncé vouloir traduire ce scénario mais, bien sûr, après la sortie du livre de base en VF, prévu pour ce mois de décembre (en compagnie de l’écran – le tout en sortie directe en boutiques).

Profitez-en bien parce qu’on ne vous dira peut-être pas ça tous les jours mais, franchement, pour peu que vous soyez titillés par l’ambiance d’Alien, foncez acheter ce kit. Le matériel est beau, le système éprouvé, le scénario de qualité. Surtout, cet achat ne restera pas vain puisque soit vous décidez de suivre la gamme et vous aurez déjà tous les accessoires nécessaires au moment d’acheter le livre complet, soit vous trouvez qu’un scénario de temps en temps c’est bien assez et vous aurez alors quand même un jeu complet réutilisable au moment de votre éventuel achat des autres scénarios « Cinéma ».

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