Donjons & Chatons : vibrisses repetita

C’est vrai : on avait déjà fait une interview Donjons & Chatons dans le Fix. Mais c’était il y a plus d’un an : il y a donc prescription. On s’est dit que, quand même, les tout derniers jours de foulancement de ce beau projet était l’occasion de reposer quelques questions à toute la fin équipe réunie par Studio Deadcrows. Il leur reste 72 heures pour vous convaincre de se joindre à l’aventure. Tic, tac, tic, tac…

 

1. Nous avons déjà eu l’occasion de faire une interview il y a un an pour le jeu alors… pfff… j’ai la flemme de vous représenter à nos lecteurs. Vous pouvez pas le faire, vous, plutôt ?

Clément De Ruyter (CDR) : Oui ça date ! Donc je m’appelle toujours Clément De Ruyter, je suis illustrateur et réalisateur dans le cinéma d’animation et j’aime beaucoup le jeu rôle (incroyable) !

John Grümph (LG) : John Grümph, fréquent invité du “Le Lundi c’est Gratuit”. Merci à vous.

Trickytophe (TT) : Trickytophe dit Tricky, auteur sur différents projets (Colonial Gothic, Nautilus, Aquablue, Awaken…). Passionné de jdr depuis plus de 30 ans !

François Cédelle (FC) : François aka Félix, co-fondateur du Studio Deadcrows et homme à tout faire (texte, édition, maquette…). J’ai fait des petits bouts de trucs çà et là sur D&C, mais j’ai surtout eu un coup de cœur pour le travail de Clément et je lui ai fait une proposition qu’il n’a pas pu refuser 😉

2. Donjons & Chatons est présenté comme un jeu « feel good ». Sauf que moi j’ai pas pris allemand LV2 au collège. Du coup, ça dit quoi du jeu ?

CDR : On parle souvent d’un jeu “familial”, j’aime bien penser que c’est un vrai jeu pour débutant.e.s que ça soit en meneuse ou joueuse. L’univers se veut rassurant et coloré mais l’injustice, l’errance, l’inconnu sont des thèmes qui vont rendre le tableau plus doux-amer voire inquiétant parfois. Bref on voulait faire un truc mignon mais pas guimauve.

LG : Feel good, c’est quand tu joues un personnage qui n’est pas cupide, envieux, violent, colérique, haineux, alcoolique et turpide. Quand tu joues pour que tout le monde autour de la table, y compris la Conteuse, se sente bien à la fin de la séance. Cela ne veut pas dire calme et apaisé, hein ? On peut avoir peur, être triste et même hargneux. Mais voilà, quelque part, tu ne joues pas pour toi, mais pour les autres.

TT : Les collègues ont tout dit. J’ajouterais juste que Donjons et Chatons est un jeu positif mais effectivement pas naïf. Il offre de multiples possibilités d’aventures à travers de nombreux thèmes, du plus tendre au plus émouvant. Surtout, de part son univers et son game design, il favorise naturellement une ambiance bienveillante autour de la table.

FC : Moi je dirais lumineux. Les illustrations sont lumineuses ou la lumière y joue un rôle important. Et le jeu, les aventures, les thématiques sont aussi eux-aussi lumineux. Il y a beaucoup de jeux sombres dans la production rolistique actuelle. Je suis fier de faire un jeu lumineux !

3. Quelles ont été vos sources d’inspirations pour le jeu ? Vos propres chats ?

CDR : Les chats évidemment ! De mon côté, un court métrage d’animation nommé Nekojiro Sou / Cat Soup m’a beaucoup inspiré, il est trouvable sur Youtube mais attention c’est pas tellement pour les petits. Un livre de Claude Ponti, Okilélé, également, je peux aussi y ajouter Bilbo le Hobbit, etc. Globalement j’aime les road trip dangereux ou une personne beaucoup trop petite doit faire face à un monde beaucoup trop grand.

Coté JdR, la découverte de Mouse Guard et Ryuutama m’ont fortement inspiré puis la lecture de Libreté a déclenché l’envie de mettre en forme cet univers.

LG : Les illustrations de Clément. Et des souvenirs de Rougemuraille et des Disney comme Brisby et le secret de Nimh ou Bernard et Bianca.

TT : Mes chats effectivement. J’ai toujours eu des chats à la maison, quand j’étais enfant puis aujourd’hui adulte. J’adore cet animal. Les dessins de Clément. Après, en vrac, Mouse Guard de Petersen, les anime du Studio Ghibli, les albums de la famille Souris d’Iwamura, les contes du Père Castor, les jouets des Sylvanian Forest families

FC : Mon surnom, c’est Félix. Je n’en dirais pas plus…

4. Pourquoi avoir choisi des chats comme protagonistes principaux alors que tout le monde sait que les chiens, c’est mieux, hein ?

CDR : Réponse premier degré mais pour moi le chat est bien plus aventureux que le chien, j’imagine souvent leur vie la nuit, en dehors des maisons… Le chien est plus fidèle et collant. Mais j’adorerais produire quelque chose sur les Chiens de la Casse qui peuplent l’univers de D&C.

LG : En vrai, les chiens c’est pas mieux que les chats et inversement. Ce sont de sales parasites qui se gobergent dans des gamelles qui se remplissent toutes seules. Au moins, dans D&C, les Chatons doivent se démerder pour faire bouillir la marmite.

TT : Rien n’empêche d’incarner un chiot dans D&C. Après, perso, je préfère les ronronnements aux jappements.

FC : J’ai toujours pensé que les chiens vivaient en 2D, au ras du sol, alors que les chats vivaient en 3D, grimpant partout. Les chats sont donc largement plus badass que les chiens (et en plus, ils viennent de l’espace) !

5. Mais, en fait, l’univers du jeu, c’est juste des petits minous mignons ou bien il y a de plus gros enjeux derrière ces histoires à poils et à moustaches ?

CDR : Pour moi, c’était important d’avoir un jeu aventureux, avec un rapport d’échelle, on commence dans un univers à taille de chat et nous ne sommes que des chatons puis au fur et à mesure les lieux deviennent plus vastes et à échelle d’homme. On se sent de plus en plus petit alors que les enjeux de la quête augmente : trouverons nous le trésor ? Retrouverons nous nos parents et le confort de l’Arbrachat ?

LG : D&C n’est pas un jeu parodique ou anecdotique. On y joue des épopées – le voyage du héros où tout est question de grandir et de devenir. C’est donc très sérieux pour les Chatons eux-mêmes ! Toutefois, pour les joueuses, reconnaissons que c’est un peu plus léger d’incarner des boules de poils. Tout au long des aventures, les Chatons sont confrontés à des situations sérieuses et compliquées, mais trouvent des solutions à leur échelle de petits trucs fragiles.

TT : Je rejoins John. D&C n’est pas une blague ou une tocade. C’est un univers et un jeu vaste, cohérent et pensé. Il y a un souffle épique et initiatique dans D&C ! C’est un jeu certes mignon mais pas artificiel ou vide de sens et de valeurs. Les Chatons sont des exilés. Ils sont jetés dehors. Ils doivent devenir autonomes et se frotter à la douceur mais aussi à la dureté du monde et des autres. Leur enjeu personnel est majeur : devenir quelqu’un malgré les circonstances dramatiques de leur déracinement, revenir aussi.

F X: Clément a tout un univers dans sa tête. On a essayé de vous en faire découvrir un bout.

6. Si tout le monde incarne des chats, qu’est-ce qui différenciera mon personnage de celui du voisin ? La couleur du poil ?

LG : Et la longueur des vibrisses. Il y a une caractéristique pour mesurer ça d’ailleurs : Mignon. En vrai, sur la fiche de personnage, outre les rares chiffres ici et là, tout un tas de trucs font la différence : le choix des talents (les compétences du jeu), le contenu du sac et les objets précieux du Chaton, les sortilèges de Miagie qu’il a appris et, bien sûr, son enfance qui définit le don unique qu’il possède.

CDR : On a aussi mis des chiots, des ratons… Vous voyez on pense à tout le monde !

TT : Il y a des Chatons du Royaume (le miage, le chapprenti, le chapardeur…), il y a des Chatons bizarres (Miaoumie, Chat-teigne…) et bien d’autres possibilités de jeu. Au niveau esthétique et du gameplay/roleplay, il y a de quoi faire.

7. Un jeu avec Donjon dans le titre qui n’utilise pas le système 5E, c’est un peu de la provocation, on est d’accord ? Qu’est-ce que votre système propose de mieux que le classique des classiques ?

CDR : J’adore D&D sous toutes ses coutures mais je ne pense pas que le terme de Donjons soit dépendant de la 5E ou même d’un système D20, on a préféré en garder l’esprit, celui du voyage, de la quête, de l’exploration tout en ayant un système simple, jouable avec de braves D6 !

LG : On pourrait te faire plein de réponses à base de : “Un bon jeu”, “Des mécaniques accessibles”, “Du matériel de qualité” et ainsi de suite. Mais, on va rester modeste. En vrai, si le titre Donjons et Chatons est bien évidemment un hommage à l’arrière-grand-père, c’est d’abord un jeu qui n’a rien à voir du tout au final – sauf peut-être l’épopée, le voyage et l’exploration qui sont des thèmes communs. Ceci étant, il y a bien des Donjons, en plus des Chatons, dans le jeu. Surtout le terrifiant, dangereux, incroyable, bizarre, donjon de Fiéfrousse où les trésors qu’on ramasse sont la connaissance et le savoir.

TT : D&C contient tout notre respect pour D&D. Un respect éclairé et non aveugle. D&C s’éloigne radicalement en termes de mécanique de l’ancêtre émérite. Pas de D20, pas d’attrition, pas de niveau, etc.

FX : D’un point de vue éditorial, nous avons déjà utilisé le système 3D6 pour des jeux familiaux (Aquablue, le livret Asmodée, etc.). L’idée d’avoir un système accessible, mais pas simpliste. Tout le monde à des D6 chez lui et c’est encore plus simple pour ceux qui connaissent déjà notre système !

8. Vu apparemment le succès de la souscription, une suite est-elle envisageable ou bien tout est dit avec ce livre de base ?

CDR : J’en ai personnellement très envie, j’ai des idées mais il faut voir ce qui est réaliste de faire et dans quel timing !

TT : Le livre est très complet. Il se suffit à lui-même. Après, l’univers de D&C est tellement motivant et riche que tout reste possible selon les envies, le temps et le calendrier de chacun et des projets à venir.

FX : On a les idées et l’envie, reste le temps à trouver. Clément à d’autres projets, en particulier une série animée, et on lui souhaite tout le succès possible !

9. Donjons & Chatons n’est pas le seul jeu mignon du catalogue Deadcrows. Il y a aussi Les écureuils attaquent ! Du coup : à quand le cross-over ?

CDR : Si quelqu’un a une super idée de module la dessus, je me colle aux dessins !

LG : Les écureuils n’ont aucune chance.

TT : Noisettes vs Croquettes ! Que la guerre multiverselle commence ! Blague à part, il s’agit de deux univers différents mais encore une fois l’imagination est un puissant aimant. L’avenir nous le dira ou pas.

FX : Dans Les écureuils attaquent, il y a des aussi chats. Ce sont mêmes les pires ennemis des écureuils… mais chut, il ne faut qu’ils m’entendent vous livrer tous leurs secrets !

10. Chose assez folle, D&C aura donc droit à une série d’animation. Pouvez-vous nous en dire plus ?

CDR : Bien sur ! A la base, D&C c’était un projet de série et depuis 1 ans et demi le travail a bien repris avec ma scénariste Mélanie Duval (travaillant, entre autres, pour Miraculous Ladybug) et le studio d’animation Watchnext Média. On est en train de réaliser un teaser d’une minute avec Jérémy Guiter, mon co-réalisateur, que je salue bien bas car il travaille d’arrache pieds pour donner vie à mes illustrations !

FX : Croisons tous nos coussinets pour que le projet aboutisse et que le succès soit au rendez-vous !