Halloween frappe toujours deux fois

… et même plus si vous n’habitez pas en rase campagne. Alors prévoyez large niveau friandises mais, tant que vous y êtes, prenez aussi une double rasade de scénarios horrifiques pour occuper vos joueurs durant cette nuit particulière. C’est justement ce que propose l’association Fondu au Noir, déjà bien connue de nos services pour plusieurs modules medfan. Leur projet Double séance : spécial Halloween est en effet en foulancement depuis peu. Même pas peur : on a été leur poser quelques questions.

1. Fondu au noir, double séance, le look de la couverture… hmmm, je me demande si vous, vous aimeriez pas le cinéma, en fait, hein ?

Oui, aux débuts de l’association en 2007 nous voulions proposer des projections de film, mais nous nous sommes vite rendu compte que cela était cher et compliqué. Alors nous avons plutôt édité un magazine « L’Indic », pendant une quinzaine d’années… Pour en revenir au cinéma, oui, c’est important. Surtout pour ce premier fascicule « Double Séance » spécial Halloween. Depuis longtemps j’aime le cinéma d’épouvante et d’horreur. Ma maman faisait un peu la tête quand je lui demandais de m’acheter Mad Movies alors que j’étais au collège. En fait, j’aime ce que l’on appelle le cinéma de genre, le polar, le thriller, la science fiction, le fantastique, la fantasy… Le scénario « Camion dans la nuit » n’aurait pas existé sans les films « Dans les hautes herbes », « Sailor et Lula » et « Breakdown ». Ou sans la nouvelle de Stephen King (Willa). Les livres ont autant d’importance que le cinéma dans l’élaboration des scénarios. La musique aussi joue un rôle important, tout comme les illustrations. J’aime me promener dans les musées ou parcourir les bouquins d’art, des idées surgissent toujours. Un scénario de Jeu de Rôle c’est un tout, un art qui se nourrit de plusieurs arts. Et le cinéma est au croisement du visuel et du sonore. L’idée de double séance – soit une double projection – c’est l’idée de se consacrer à un moment. Se rendre dans une salle obscure, ce n’est pas regarder un film sur son téléphone portable en mangeant ou en faisant la cuisine. C’est s’enfermer dans une salle et se concentrer sur une histoire. C’est s’immerger, se laisser submerger… comme dans une bonne soirée de Jeu de Rôle.

2. Alors, OK, mais à l’heure où D&D est adapté au ciné, vous, vous laissez tomber le medfan : vous en aviez ras-le-bol ?

Non, non pas du tout. Dans notre série de scénarios 5e, « L’Arbre-coeur » c’est l’automne, « Le Vent sur la frontière » c’est l’hiver, « L’Île aux fleurs » le printemps ; il nous reste l’été à faire. J’y travaille avec « Les Sables Rouges », prévu pour 2024 et toujours illustré par Rackham le Roux. Je lui ai déjà donné quelques éléments autour du scénario. C’est important pour moi les illustrations dans le Jeu de Rôle. Elles donnent un ton, une ambiance, une particularité, tout un monde. Je reste un adepte des règles de Donjons & Dragons et plus largement du médiéval fantastique, c’est une base et un refuge pour l’imaginaire. J’ai commencé à jouer avec la boîte Initiation au Jeu d’Aventure de L’Oeil Noir (celle de Schmidt France)… Prononcer les noms de Warhammer, Rêve de Dragon, L’Ultime Épreuve ou Terre du Milieu évoque pour moi une foule de souvenirs. Maintenant nous jouons à D&D (5e) et L’Anneau Unique pour les univers renaissance et médiéval fantasy. Il peut m’arriver d’avoir ras-le-bol du medfan, mais cela ne dure jamais plus d’une ou deux semaines.

3. Niveau système de jeu, quand on passe au contemporain, on fait moins les malins : c’est plus la 5E ou rien. Pourquoi ce choix de FATE et du Basic ?

Au départ « La Fosse » a été écrit et joué avec les règles de Chill. Mais bon se pose la question des droits et Cie. Et puis du public. Beaucoup de gens jouent à D&D et connaissent les règles de la 5e. Chill (qui est un de mes jeux favoris) ne touche pas grand monde en France. « Camion dans la nuit » a été écrit et joué avec FATE. Franchement FATE c’est le système que je préfère à l’heure actuelle (https://fonduaunoir.fr/2023/09/07/les-aspects-dans-le-jeu-de-role-fate/). Je ne suis pas fan des systèmes génériques et je pense que les règles font partie de l’ambiance d’un jeu. Elles sont importantes. Ce qu’il y a de génial avec FATE c’est que ce système remplace les statistiques (les données chiffrées sur la feuille de personnage et dans la plupart des règles) par une phrase, voire un mot. C’est du narratif de chez narratif ! Il y a quelques années, un joueur qui composait son personnage à Chill me disait que son trait principal était une large blessure au milieu du visage. J’ai alors cherché à traduire ça en données chiffrés… Un score élevé en Charisme voilà ce qui m’est venu comme idée. Mais cela ne traduisait pas l’étendue de ce que cette cicatrice pouvait et voulait dire, comment il allait s’en servir en terme de jeu. Avec FATE tu écris « Mon passé m’a laissé une large cicatrice au milieu de mon visage » et le tour est joué. Quand le joueur ou la joueuse veut se servir de sa cicatrice pour influer sur l’histoire qui est en train de se dérouler, il lui suffit de le dire. Pas besoin de se lancer dans des chiffres ou des règles particulières. C’est simple, rapide et fluide. Le problème c’est que FATE ne semble pas être très connu en France, pas beaucoup pratiqué… Tout semble à faire autour de ce système, qui est parfois compliqué de manière inutile à mon sens par celles et ceux qui s’en emparent et y rajoutent… des règles et des données chiffrées.

Du coup il fallait tout de même un système plus connu, celui de L’Appel de Cthulhu, Runequest et des jeux Chaosium. Le système D100 (BASIC) nous a paru être une bonne alternative. Il est simple et plutôt répandu.

J’ai commencé à jouer en 1987… à cette époque j’adaptais tout et n’importe quoi à nos jeux favoris. Si l’idée contenue dans un scénario de James Bond me plaisait, je m’en emparais pour le jouer dans le monde de Warhammer, avec les règles de Warhammer. Un scénario cela s’adapte, c’est même un plaisir de l’adapter pour le tordre un peu à sa propre sauce. À l’époque j’avais fini par créer un système de jeu très simple pour pouvoir tout jouer. Enfin, surtout du contemporain parce qu’il n’y avait pas beaucoup de jeu contemporain à part Trauma. Franchement si j’avais eu FATE à ce moment-là, je l’aurai adopté tout de suite ; il est très proche de ce que je faisais.

4. D’habitude, vous aviez un plan carré-carré avec des modules uniques. Pourquoi passer à un recueil de deux scénarios ? Cela risque de rendre le produit plus cher, non ?

Oui le fascicule sera plus cher. Nous sommes au plus près des coûts réels. 19 euros pour deux scénarios, deux soirées à 4 ou 5 personnes, cela reste honnête. Et même si c’est juste pour le lire, je pense que cela vaut le coup. Deux voyages avec deux illustrateurs Frédéric Guédon et Matthieu Papy, deux styles différents réunit autour d’une thématique (Halloween), moi je signe tout de suite. La thématique, c’est quelque chose que nous allons essayer de tenir avec ces DOUBLE SÉANCE. Cela me semble intéressant de proposer deux histoires autour d’un thème. Cela donnera envie de continuer à creuser à celles et ceux qui liront où joueront ces scénarios. D’autres histoires verront le jour. Parce que en vérité, notre truc, c’est de se raconter des histoires, toujours, sans cesse. C’est à la fois un refuge, une façon de communiquer et d’avoir des sensations, de bâtir un imaginaire partagé. De vivre, quoi.

À Bertric-Burée lors d’un agréable week-end autour de la ruelle Gary Gygax (https://fonduaunoir.fr/2023/07/11/ruelle-gary-gygax-un-week-end-de-jeux-de-role-a-bertric-buree/) nous avons joué une scénario « Première guerre mondiale » (on peut tout faire avec FATE…) et cela a bien fonctionné. J’ai une autre idée de scénario sur 14-18, du coup… un DOUBLE SÉANCE Spécial 1ere Guerre Mondiale pourrait voir le jour… Nous verrons. Ce ne sont pas les idées qui manquent. Tant que j’y pense, autre chose au sujet du prix, nous travaillons avec une imprimerie près de Nantes (où l’association est basée) et nous tenons à rémunérer les illustrateurs. C’est une économie et une déontologie.

5. C’est supposé être pour Halloween et le foulancement finit le 13 octobre. Euuuuh ? (…) C’est pour Halloween 2024, c’est ça ?

Comme pour « L’île aux fleurs », nous allons suivre le même schéma : le scénario a été envoyé aux souscripteurs deux semaines après la fin du financement participatif. C’est un calendrier très serré pour que le fascicule arrive dans les boîtes à lettres pour Halloween. Mais nous devrions y arriver. On aime bien ce genre de défi, et le fait de travailler avec un imprimeur en proximité nous fait gagner du temps.

6. On commence par un module, puis 3 modules puis un recueil de scénarios… Je mets un billet sur le fait que Fondu au Noir reviendra nous voir avec son propre jeu avant longtemps, pas vrai ?

Oui, c’est en vue. Nous y travaillons… et nous y travaillons en jouant. Depuis quelques temps nous explorons les galaxies dans un univers Space Opera. Nous le faisons avec le système de base de FATE. Le projet se solidifie petit à petit, chaque scénario permet d’avancer dans l’univers, de le découvrir, de le construire. C’est une forme que j’aime, découvrir un monde et le voir se déployer en jouant. Mais chaque chose en son temps. Comme je vous le disais tout à l’heure il y a « Les Sables rouges » le dernier scénario des 4 saisons qui attend. Il me reste des ajustements à faire dans l’histoire. J’ai l’ambiance, la thématique… mais il me manque quelque chose.

Et puis pour l’instant nous sommes dans cette Double Séance spécial Halloween, et je ne vous cache pas que cela me fait un peu peur. Il y a un public pour la 5e. Nous avons de bons retours sur les scénarios aussi bien en lecture simple qu’en partie sur table. Mais est-ce que les meneuses et les meneurs de jeu, les joueuses et les joueurs vont nous suivre sur de l’épouvante contemporaine ? Ce serait bon ! Cela ouvrirait la porte à d’autres projets, d’autres illustrateurs… et d’autres heures de jeux.

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