Arkhane Asylum n’est pas sorti de l’auberge [chronique – Auberges remarquables]

Alors, non, ceci n’est pas un article sur l’arrêt brutal du foulancement Nightfell.

Non plus, ce n’est pas une moquerie facile sur le retard accumulé par Maléfices : le jeu est pile en cous de livraison. Et toc.

Sur GODS alors ?

Non plus.

Metro 2033 ?

Nope.

Non, à l’ancienne. Un supplément. 5E. Sorti directement en boutiques sans foulancement ni rien. Oui, nous aussi, ça nous fait drôle.

Il s’agit plus précisément d’un supplément 5E générique (enfin, vous connaissez le truc : « convient pour tout système medfan en étant à sa 5ème édition », quoi) consacré à un sujet qu’affectionnent tous nos PJ : les Auberges Remarquables. Début d’aventure chelou, pause salvatrice pour remonter les PV à grands coups de plats réconfortants, enquêtes laborieuses à essayer de tirer quelque chose de PNJ pourtant visiblement éméchés, voire festin de fin d’aventure digne d’Asterix : il y a toujours une bonne raison pour se rendre dans une auberge lors d’une campagne dans le dungeonverse.

Ce supplément d’une taille raisonnable (104 pages) sous-titré  « de la table au comptoir » ne cache donc pas son ambition simple : vous saurez tout sur le zin-zinc. Des exemples prêts à servir, des tables et encore des tables pour faire vivre tout ça, de quoi créer vos propres auberges… c’est tout cela qui est au menu.

Il s’agit en fait de la VF d’un supplément de chez LoreSmyth devenu spécialiste de ce genre de suppléments génériques thématiques par lieux. Il existe aussi les boutiques remarquables, les lieux de culte remarquables et peut-être plus à l’avenir. En cas de succès, on les verra peut-être débouler en VF à leur tour.

Petite originalité, la VF de AAP n’est pas à 100 % le décalque de la VO puisqu’elle inclut une auberge supplémentaire, « Le Poney Lubrique », en partenariat avec La Bonne Auberge et Le Bon Nerd, chaîne YouTube dédiée aux passionnés de jeux.

Le solide ouvrage s’ouvre sur une série d’auberges clefs-en-main. C’est un peu curieux. J’aurais plutôt imaginé le système de création d’auberges d’abord puis une série d’exemples de ce qu’on peut faire avec mais (…) oui, voilà : c’est pour ça que je n’écris pas de guides sur les auberges medfan.

Il y a donc de quoi faire avec pas moins de 9 auberges décrites par le menu. Évidemment, pour se renouveler, les auteurs tirent un peu sur la corde et certaines sont assez improbables. Disons que vous ne pouvez pas prendre n’importe laquelle de ces 9 auberges et la placer dans n’importe quelle ville visitée par les PJ. Il y a « l’auberge des nains », « l’auberge du désert », etc.

Ce sont les limites du prétendument « générique ». Il faut sans doute plutôt prendre cette liste comme une source d’inspiration pour y picorer un bâtiment, un aubergiste, une singularité quelconque… plutôt que du 100 % transposable. Heureusement, certaines ne sont pas de classiques auberges urbaines, plutôt des étapes ou des caravansérails plus faciles à placer au gré des besoins. Cela dit, elles n’en sont souvent que plus singulières et pourraient aussi présenter des difficultés d’inclusion dans les spécificités de votre setting. Disons que, par exemple, il vaut mieux qu’il y ait des îles volantes ou des oiseaux anthropomorphiques…

Chaque auberge est présentée sur 6 pages (honnêtement, c’est suffisant) avec un grand luxe de détails : une illustration de l’extérieur, un ou des plans de l’intérieur, des encarts s’attardant sur l’aubergiste ou en tout cas une personnalité remarquable du lieu et, cerise sur le gâteau, une bonne liste de spécialités servies sur place. C’est éminemment photocopiable et cela peut donc être placé au centre de la table pour ajouter une touche d’ambiance.

L’ajout franco-français ne fait pas trop cocorico et, franchement, on se serait bien passé de ce lupanar avec son prostitué nain sorti de La Cage aux Folles et de ses fines spécialités comme, je cite, « la bonne petite olive » ou « la bonne pisse ». Comment on dit déjà ? Ah oui : rabelaisien.

Le chapitre suivant apporte toutes sortes de variables à la mise en scène des auberges dans votre partie. Le moins que l’on puisse dire, c’est que c’est très complet et, entre sous-systèmes (très simples, en général), tables et listes de matériel, on passe en revue les services fournis, l’accueil du propriétaire, les tarifs, la sécurité des lieux, les jeux d’argent, les rixes, les chants à la veillée, etc. Rien n’est oublié. On s’interroge quand même un peu sur la façon d’utiliser tout cela. Il semble évident qu’à vouloir trop en faire, on risque d’alourdir notablement la bonne vielle visite à l’auberge. Tout ceci ne sera franchement utile que si l’auberge joue un rôle central dans la campagne ou pour y picorer un point précis qui vous semble essentiel à la mise en jeu d’une auberge précise.

La dernière section est consacrée au système de création d’auberge. Cela se fait bien évidemment à travers une flopée de tables à solliciter à l’aide de vos dés (D10, D20 voire D100 pour la bonne grosse ta-table) ou bien à parcourir à la recherche de l’inspi qui va bien. Emplacement, nom de l’auberge, traits saillants de celle-ci, atmosphère, description de l’aubergiste…  Tout est passé en revue. Les deux plus grosses listes sont consacrées respectivement aux clients avec 100 propositions de PNJ à accouder ou à attabler dans votre auberge puis à 100 accroches/événements pouvant mettre un peu d’animation dans les lieux. C’est d’ailleurs probablement là la plus saine utilisation de tout ce bazar : décrire une auberge de départ, la peupler de PNJ chelous, y placer deux/trois événements aléatoires… et jouer pour voir ce qui va se passer. Pour une utilisation en mode plus traditionnel (comprendre : avec un scénario déjà prêt), on se passera de la quasi-totalité de ces détails.

Au bilan, Auberges remarquables est un achat tout à fait recommandable pour peu qu’on soit sûr d’en avoir un usage bien précis. Si on achète « juste pour voir », il y a sans doute meilleure façon d’investir son pécule jeu de rôle.

Tenez, par exemple, vous saviez que LG avait publié un générateur d’auberges (pardon, de taberges !) dans le Compagnon #2 pour Cœurs Vaillants. Cela fait le même job, peut-être en plus inspiré (question de goût, cela dit) pour un prix bien inférieur et cela contient même plein d’autres choses utilisables avec sa 5E comme un générateur de ruines (par exemple). Bien sûr, je dis ça, je dis rien…