Ma doué, revoilà Trégor !

Ah, celui-là, vous ne pourrez pas dire que vous ne l’aviez pas vu venir : cela fait des mois et des mois qu’il est mentionné sur notre planning. Pour tout dire, même, ne voyant plus guère d’agitation du côté de la filiale JdR de chez Mnémos, on s’apprêtait presque à le retirer pensant le projet avorté.

Mais non, c’est désormais officiel : Trégor va prochainement ressortir dans une version très, très augmentée chez Mnémos, donc.

Très quoi ?

OK, jeunes gens, je vois ce que c’est. Laissez-moi le temps de rechausser mes verres progressifs et de rallumer ma pipe et je vais vous conter cette histoire que les rôlistes de moins de 40 ans ont peu de chances de connaître.

Dans les années 1980, il y a bien peu de choix pour les rôlistes francophones qui veulent, dans leur langue maternelle, accéder à des univers medfan faits pour le JdR. Les settings AD&D sont souvent emberlificotés dans des histoires de droits et de traduction, Runequest n’est traduit au compte-goutte qu’à partir de 1987, MERP à peu près aux mêmes dates et rythme et les créateurs francophones ont déjà un goût marqué pour des univers historiques ou, au moins, assez éloignés des standards du dungeonverse.

C’est dans ce cadre restreint que paraît alors un univers dit générique nommé Trégor. Il est l’œuvre de Paul Chion, alors mieux connu comme rédacteur en chef du magazine Dragon Radieux. L’univers y a d’ailleurs été développé au fil des articles publiés dans la revue, façon rubrique régulière et ce dès le numéro un paru en 1985.

Il a aussi fait l’objet de trois livrets sous couverture rigide, une présentation d’ensemble, sorte de livre de base avec deux scénarios et même une fiche de personnage puis  un célèbre atlas et une campagne en six épisodes. Le tout, donc, aux éphémères Éditions du Dragons Radieux, les bien nommées.

Qu’on ne s’y trompe pas, d’ailleurs, malgré son nom qui fleure bon la galette de blé noir et les embruns, Trégor est vraiment un univers medfan des plus classiques avec, peut-être, un petit tropisme du côté de chez Tolkien, en tout indiscutablement une touche low fantasy et une volonté d’atteindre un certain niveau de réalisme. Cette impression est renforcée par l’ajout d’un très gros appareil cartographique signé du grand spécialiste du genre à l’époque, Patrick Durand-Peyrolles (par ailleurs créateur de la fameuse carte de Laelith). C’est même, à vrai dire, la seule chose qui fait vraiment connaître l’univers de jeu à l’époque, des cartos d’aussi belle facture étant alors très rares.

En termes de système de jeu, c’était officiellement à l’époque du « générique » : « convient à tout jeu médiéval fantastique » comme on disait à l’époque… A noter tout de même que l’univers de jeu était livré avec quelques éléments d’un système de substitution, au cas où.

Mnémos ambitionne de donner un tout autre souffle à cet univers. A part les cartos de Durand-Peyrolles,  apparemment reprises en version colorisées, il ne reste plus grand choses des livrets noir et blanc aux couvertures d’un goût douteux. A la place, on devrait avoir, si le foulancement se passe bien, toute une gamme de fort beaux ouvrages tout couleurs.

L’objectif est clairement de faire de Trégor un jeu à part entière puisqu’il va être doté de son propre système de jeu, a priori assez simple et adapté au nouveau style voulu pour le jeu.De grands domaines d’influence (Arts, Cités, etc.) sont évalués à l’&aide des dés polyédriques habituels : D4, D6… jusqu’à D20 inclus. Ils fonctionnent plus ou moins comme les désormais fameux dés d’usage : quand vous lancez un de ces dés, il réussit très souvent mais échoue tout de même sur un résultat faible de 1 ou 2, ce qui, en outre, provoque la réduction d’un niveau du dé en question (de D10 à D8, par exemple). Des traits variés (équipements, pouvoirs, etc.) permettent de lancer deux dés et de garder le meilleur aloes que des conditions défavorables vous font faire l’inverse. Il existe aussi une magie assez free form à base de mots magiques à combiner.

La proposition de jeu évolue également puisqu’il s’agit apparemment de s’appuyer sur les descriptions géographiques et les cartos pour en faire un jeu assez high level dans lequel les PJ, conseillers d’un puissant seigneur, font mu-muse avec la géopolitique locale et y sont chargés des missions délicates et des décisions difficiles.

Le futur foulancement (dès ce 27 juin) visera d’abord à financer un livre de base, de taille assez modeste (150 pages) mais de grand format (28,5 x 21,5 cm). Comme il se doit, il comprendra tout le nécessaire pour débuter, y compris le système de jeu original, donc, mais également 6 prétirés et un premier scénario. Un livre de base/kit de découverte en quelque sorte.

A cela devrait s’ajouter un plus gros livre (environ 240 pages) intitulé La Boîte à outils de Trégor. C’est à la fois l’encyclopédie et l’atlas du jeu mais, contrairement aux versions originales, ils seront vraiment orientés vers le jeu en fournissant pour chaque entrée des PNJ, accroches de scénarios, aides de jeu, etc. L’ouvrage se conclut par une campagne de pas moins de six scénarios. Des paliers sont prévus pour enrichir encore plus cette boîte à outils.

La gamme est complétée par 3 livrets de 32 pages, un pour chaque Nation importante de Trégor. Ils reprennent des textes de Paul Chion, revus pour l’occasion, qui présentent ces Nations de leur propre point de vue afin d’aider à l’immersion des futurs joueurs. Ils sont mis en page selon un fac-similé de manuscrits médiévaux en y intégrant les cartographies d’origine.

On ne pouvait imaginer pareil foulancement sans également un tiré à part de ces cartographies : deux grands posters sont donc prévus. Un portulan (un atlas, quoi) avec la compilation de toutes ces cartes sera également disponible en options. Au titre des accessoires, on peut ajouter les inévitables écran du MJ, jetons, dés spéciaux, etc.

Enfin, un étui rempli d’aides de jeu est proposé : il s’agit de 80 fiches cartonnées et facile à manipuler pour disposer des informations, de règles et d’univers, à communiquer aisément aux joueurs autour de la table. Particulièrement utile, notamment, lors de la phase de création des personnages.

On reparle très bientôt de cet alléchant projet avec une interview de l’équipe à lire dans le Fix la semaine prochaine.

3 pensées sur “Ma doué, revoilà Trégor !

  • 24 juin 2023 à 11:50
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    Très beau projet, seul bémol, je ne suis pas convaincu par les illustrations. J’attends d’en voir plus.

  • 26 juin 2023 à 15:11
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    Je possède la collection des dragon radieux et ce qui a été fait pour Trégor. J’attends vraiment de voir ce qui va être fait avec cette nouvelle mouture. J’espère que cela ne va pas devenir un bel objet de collectionneur nostalgique cher et inutilisable qui va finir par prendre la poussière sur une étagère.

  • 12 juillet 2023 à 16:30
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    Bravo pour ce post qui dresse un portrait des plus réalistes de ce monde de Trégor que les éditions Dragon Radieux ont porté à bout de bras dans les années 85/90. J’avais prévu de nombreux développements, mais ces projets n’ont jamais abouti. J’avais prévu une réédition dans les années 2010 suite à de nombreuses demandes, mais je n’ai pas trouvé l’énergie et la motivation suffisante pour porter le projet.
    La rencontre avec Fred Weil et la présentation de son projet d’en faire un jeu à part entière ont été un grand moment de joie. Je pense que les bons joueurs de jeux de rôles, amateurs de simulations riches plutôt que de successions de lancers de dés, ne seront pas déçu. A l’époque, l’univers avait été considérablement enrichi par les maîtres de jeux qui se sont un peu investis dans le projet. La nouvelle mouture proposée par Mnémos constitue un grand pas en avant à mon avis.

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