Cthulhu des Âges Sombres

Plus blanc que blanc, ça fait gris ? Plus noir que noir, Cthulhu plus Ténèbres, ça fait quoi ? On ne va pas tarder à avoir la réponse quand les XII Singes lanceront, le 19 août sur gameon, leur campagne de foulancement pour Cthulhu Tenebris.

Cthulhu Tenebris propose de jouer en Europe en 870 de notre ère. L’idée de faire un mélange Cthulhu et cotte de mailles en jeux de rôles a une histoire assez ancienne à commencer par Cthulhu Dark Ages (déjà trois éditions depuis la première parution professionnelle en 2002) ou même avant les différents modules et univers D&D ou OSR qui croisent Yog-sothoteries et épées (+1 les épées, ça vaut mieux pour cogner sur des créatures du mythe).  Et on en oublie sûrement car le poulpe ça ce mange un peu à toutes les sauces (et quand on pense que même cette blague est éculée, on comprend que ça pourrait bien devenir écoeurant).

Mais ici on ne parle pas d’un jeu indépendant mais plutôt d’une sous-gamme du Cthulhu Hack, le jeu traduit et développé par les XII Singes commençant par une campagne que prépare Franck Plasse. On en a d’ailleurs parlé dans notre monumental planning des sorties francophones. L’auteur l’avait aussi évoqué quand on l’a interviewé pour le foulancement de Mythender et qu’il avait mentionné une « campagne perso de Cthulhu Hack au Moyen-Age pour jouer pendant les vacances avec les autres Singes » (on espère qu’ils ne sont pas vraiment douze, parce que ça fait quand même beaucoup pour du Cthulhu sérieux).

Bandeau Cthulhu Tenebris / Cthulhu hack

Franck Plasse (qu’on avait aussi interviewé en 2021) a une ludographie plus longue que le bras et touche à des genres et des jeux très variés. On notera cependant que les ambiances historiques ne lui sont pas inconnues. Il a notamment participé à la gamme Medium Aevum (la version XII Singes de l’excellent Chronica Feudalis) pour lequel il a déjà rédigé La Flamme Verte, une campagne médiévale écossaise. Dans le cas de Cthulhu Tenebris, l’auteur a choisi de remonter un peu le temps (du XI° au IX° siècle) et de se centrer sur le comté du Velay, en Auvergne. Il entend exploiter le folklore local pour proposer une campagne complète dans laquelle les personnages incarneront des suivants d’un donneur d’ordre et seront chargés par lui d’amener à l’Evêque local un certain livre de médecine. Il est question de trucs indicibles mais également de maladie et de folklore (le guide de l’Auvergne mystérieuse des éditions Plon a servi de livre de chevet à l’auteur si l’on en croit son blog).

Comment Franck Plasse a choisi le contexte pour sa campagne Cthulhu Tenebris

Notons d’abord que ces éléments sont indémodables (le public ne semble pas prêt de se lasser de Cthulhu) ou bien dans l’air du temps. Le thème de la maladie est également présent dans la campagne parue pour la V2 de Brigandyne et on a vu fleurir les jeux et suppléments proposant d’exploiter le folklore local (ne citons que le magnifique bestiaire des Merry Mushmen paru pour OSE et D&D 5). Cthulhu Hack étant un dérivé du Black Hack, un jeu medfan à la base, la mécanisation ne devrait pas non plus poser de problème. Si l’on ajoute à cela l’excellente réputation des XII Singes et leur capacité à mener des projets et à les livrer dans les délais ainsi que les talents de l’auteur, on peut faire l’hypothèse que Cthulhu Tenebris a toutes les chances de trouver son public et de connaître le succès.

Mais ce qui nous a frappé (et plu) à la Rédac c’est le fait que Franck Plasse tienne un blog où il raconte la génèse de cette campagne. A raison d’un post par semaine depuis juin, on l’a vu chercher et trouver un lieu (en choisissant dans sa collection de guides Plon), présenter sa méthode d’écriture et de recherche et expliquer comment il structurait cette campagne à venir. C’est furieusement intéressant qu’on soit un curieux désireux de mieux comprendre les arcanes de la création rôlistique ou un aspirant écrivain de jdr qui désire étudier les méthodes d’auteurs expérimentés.

Carte dessinée à la main par Franck Plasse pour Cthulhu Tenebris

Et on apprécie d’autant plus cet effort au Fix qu’on ne peut que constater que l’heure n’est pas à la transparence. Beaucoup d’auteurs, à bon ou à mauvais escient hésitent à parler de leurs projets par peur du plagiat ou pour préserver l’effet de surprise. Les éditeurs, même les plus connus suivent la même route d’une communication minimale. A vrai dire, la tendance récente est encore plus inquiétante, tant certains éditeurs semblent davantage soucieux de gérer leurs « communautés » et de les enfermer dans un discord ou un compte facebook plutôt que de communiquer publiquement. Narbeuh l’a par exemple récemment relevé avec le Patreon d’Agate.

Entendons nous bien, on comprend qu’un éditeur veuille aligner des sources de revenus en face de coûts (ceux de la communication en l’occurrence). C’est un moyen comme un autre de pérenniser l’activité et les emplois. Mais on ne peut à l’inverse que saluer Franck Plasse qui rend visible et accessible à tous son travail sans pour autant trop en dévoiler, renforçant l’intérêt et l’attente et donc les revenus de l’éditeur.  Chapeau, donc, monsieur le Singe !

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