Le Lanternier – Le nec roman plus ultra [Chronique]

Avant de commencer à rentrer dans le vif du sujet, je tenais à clarifier quelques points avec vous. Tout d’abord, je ne suis pas un critique de roman. Il y a probablement certains critères essentiels à côté desquels je pourrais passer. Pour moi, la lecture est un plaisir divertissant où l’histoire et les personnages priment sur le reste. Et ce sera donc l’approche principale qui orientera l’avis ci-dessous.

Ensuite, vous devez également savoir que je suis meneur à Pax Elfica. Je connais donc parfaitement le contexte, la ville et ses personnages clés qui l’occupent.

Et enfin, j’ai lu le livre au format ePub. Je ne pourrais donc pas donner mon avis sur la magnifique édition publiée chez Mnémos.

Maintenant que nous nous connaissons un peu mieux, je peux m’ouvrir un peu plus à vous et vous partager mes craintes à l’annonce de ce roman. Car oui, j’ai eu beaucoup de craintes. Même si l’idée d’un roman issu de l’univers génial de Pax elfica m’enchante. Même si savoir que le dit roman sera écrit par Pierre Grimbert m’enthousiasme encore plus ! Une question ne cessait de me hanter : comment ?!? Comment raconter une histoire sans empiéter sur celles du jeu ? Comment rendre l’intrigue intéressante sans dévoiler les secrets de la campagne ? Comment offrir de vrais enjeux aux protagonistes de l’histoire sachant que les vrais héros sont les PJ ?

Et après avoir lu le roman, je fus rassuré (et vous aussi du coup, maintenant que vous partagez mes craintes) car à toutes ces questions Pierre Grimbert a su répondre (ou les contourner) avec brio ! Le roman est clairement une réussite, avec deux points fort que je vais vous détailler ci-dessous. Mais avant, pour ceux qui ne connaissent pas encore Pax Elfica, voici un bref rappel du contexte.

Un état totalit’elfe

Finie l’époque où tous les rôlistes voulaient jouer un elfe après avoir vu Legolas descendre des escaliers en surfant sur un bouclier. Aujourd’hui, les elfes ont mauvaise presse.

L’histoire de Pax Elfica se situe dans une région reculée appelée Valspente. A la frontière de plusieurs royaumes (elfes, peuples du Nord), elle fut victime il y a quelques dizaines d’années de l’invasion d’un nécromant et de sa horde de morts-vivants. Alors que l’issue du conflit était en faveur de ce dernier, le peuple elfique sortit de sa forêt, prit part au combat et délivra la région du sombre sorcier et de son armée. Accueilli en sauveur, le peuple elfique continua d’occuper la région, et plus particulièrement la ville de Brenhaven (là où se situe l’action du jeu) et y instaura un état totalitaire. Étouffée par l’occupation elfique, la résistance se mit en place parmi les habitants de Brenhaven et des environs.

Du jeu au roman

L’action du roman, quant à elle, se déroule juste avant le premier scénario de la campagne. Pour être plus précis (et pour ceux qui connaissent la campagne), au tout début un convoi arrive en ville pour vendre des marchandises aux halles. Ce dernier est très attendu car le premier convoi de la saison a été attaqué par les Iffriers. Le roman se situe après l’attaque du premier convoi et avant l’arrivée du suivant. Vraiment quelques jours avant le début de la campagne, donc.

L’histoire est celle de Tolan Dunkar, un lanternier nain sans histoire, de sa femme et d’une halfelin, devenue amie de circonstance. Dès le premier chapitre, Tolan va subir malgré lui un enchaînement d’incidents qui vont le mettre dans une situation très problématique. C’est le début d’une mésaventures aux enjeux très forts. Une véritable intrigue prenante et différente des quatre arcs narratifs proposés dans la campagne. Ce qui donne un vrai intérêt à lire cette histoire, même si on connaît ou on a déjà joué la campagne.

Et c’est aussi là la première force du roman : réussir à mettre en scène des petites gens, qui vont évoluer à coté des PNJ clés du jeu. Aujourd’hui on a l’habitude de cette notion de « spin off » avec, par exemple, Star Wars qui a son histoire canon (les films) et sa déclinaison en plusieurs histoires annexes à travers des séries lives ou animées. Mais ce qui peut être facile à faire à l’échelle d’une galaxie (ne pas toucher à l’histoire principale, éviter de croiser les personnages principaux) est ici fait dans l’enceinte d’une seule et même ville. Un exercice un peu plus délicat, mais dans lequel Pierre Grimbert s’en sort magistralement bien.

D’un coté, on a un roman à part entière qui se suffit à lui-même (si vous ne connaissez pas le jeu Pax Elfica, pas d’inquiétude, tout ce qui vous devez savoir de l’univers vous est expliqué). Et de l’autre, il y a plein de clin d’œil ou plutôt une introduction à ce qui va servir pour le jeu (la flèche, le griffon, Answald & Signhild, Canaan, …). Certains protagonistes du roman interagissent même directement avec certains d’entre eux comme Rosa ou Carmichael par exemple. Et en tant que meneur, c’est un vrai plaisir de voir ces personnages « prendre vie ». Et c’est une transition toute trouvée pour vous parler du second point fort du livre : la source d’inspiration qu’il incarne.

Du roman au jeu

Faire jouer Pax Elfica peut intimider. Je connais une meneuse qui a adoré la campagne, mais qui a revendu son exemplaire car elle ne sentait pas capable de la faire jouer. Et je trouve que le roman s’avère être une excellente entrée en matière pour les MJ qui n’osent se lancer. Car sa lecture permet de bien s’imprégner de l’oppression elfique, de l’impact des enfaytés (que ce soit la peur de le devenir, ou la crainte qu’il dégage en tant que membre du guet) ou encore du quotidien des habitants. De plus, comme évoqué plus haut, le roman met en avant des éléments qui sont plus en second plan dans le jeu. Ce qui permet, pour un MJ, d’avoir de la matière pour donner vie à la ville. J’avoue que j’aurai aimé lire ce roman avant de me lancer dans la campagne.

D’ailleurs, l’auteur lui même fait du pied aux rôlistes. Je cite, page 257 :

« Mais vous demandez l’impossible, rappela Galaë. Organiser un soulèvement contre les elfes, à nous cinq ? Nous ne sommes pas de taille. Qui le serait d’ailleurs ? Bon courage aux héros qui s’y frotteront. »

Ami(e)s rôlistes, c’est à vous de jouer !

Pax Romanà lire

En tant que meneur à Pax Elfica, j’ai bien conscience que mon avis est biaisé. Mais, objectivement, Le Lanternier est un bon roman qui va au-delà du simple produit dérivé. Il contient tout ce que je peux attendre d’une telle histoire : des personnages attachants, des antagonistes menaçant, une histoire prenante avec de vrais enjeux. Et il n’y a pas besoin d’avoir lu le jeu de rôle pour l’apprécier.

Maintenant, pour ceux qui connaissent le jeu de rôle, forcément, il prend une tout autre dimension. Comme si, au-delà du simple « name dropping » de certains PNJ, il nous donne l’impression de voir ce qui se passe « hors champs », ou regarder la ville en plusieurs dimension. Par exemple, quand l’un des personnages principaux sort de l’auberge du pont et voit, devant la salle de jeux, une femme enceinte prendre l’air. Tout de suite, on reconnait ce personnage et ce qu’il représente. Il y a comme un mini feu d’artifice d’histoires qui nous arrive en tête.

Et l’approche du roman donne la possibilité à n’importe qui de le lire. Que vous soyez meneur, joueur, rôliste ou pas. Il n’y a pas de spoiler ou de paradoxe avec les arcs narratif de la campagne. C’est très malin et surtout très bien concrétisé.

Un roman pour lequel j’avais beaucoup d’attentes, où la déception aurait pu être toute aussi grande. Mais au contraire, j’ai vite été rassuré, et même emballé par sa lecture.

3 pensées sur “Le Lanternier – Le nec roman plus ultra [Chronique]

  • 11 avril 2024 à 11:41
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    C’est très tentant ! Il y a une question que je me posais, pour nous qui nous sommes écartés des prétirés : tu cites Rosa, est-ce qu’il y en a d’autres qui sont mis en scène dans le roman ?

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    • 11 avril 2024 à 11:51
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      Bonjour,
      Il n’y a pas d’autres pré-tirés qui sont mis en scène.
      Et Rosa, c’est juste le temps d’une scène.

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